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« La collusion entre élites économiques et politiques entretient l’inaction face aux dérèglements climatiques »

« La collusion entre élites économiques et politiques entretient l’inaction face aux dérèglements climatiques »


Les moyens de concilier sociologie et économie restent l’objet de bien des interrogations. Les réunions de la COP27 viennent de fournir une nouvelle occasion de diffuser le récit d’entreprises qui seraient devenues conscientes des risques globaux. Mais ce discours rassurant est sans cesse contredit par une avalanche de faits ; rappelons-en quelques-uns dans l’actualité de ces derniers mois.

Orpea, célébré jusqu’en 2021 pour son exemplarité éthique dans le classement sectoriel de L’Express, s’est révélé en 2022 comme un groupe mettant gravement en cause les droits humains de ses résidents ; Emmanuel Fabert, PDG de Danone, qui s’était légitimé par le choix de l’entreprise à mission, a été destitué par ses actionnaires ; Total, qui fait valoir l’ampleur de ses engagements en matière de responsabilité sociétale, a été contesté dans ses investissements en Russie (Le Monde du 24 août 2022), comme en Ouganda (tribune du Monde du 10 septembre 2022) ou en Tanzanie (rapport des Amis de la Terre et de Survie cité dans Le Monde du 5 octobre 2022).

La situation est donc trop grave pour s’en remettre à la bonne volonté des dirigeants, d’autant plus que la collusion entre élites économiques et politiques entretient l’inaction face aux dérèglements climatiques. C’est bien la dynamique même du capitalisme contemporain qui est en cause. Renouer avec une critique à son égard est donc essentiel pour sortir de l’impasse mais, pour être convaincante, la critique se doit d’articuler les dimensions écologique et sociale.

Dépasser l’opposition écologie et social

Or l’interdépendance entre ces deux dimensions, si elle est cruciale, n’est pas évidente à traiter. L’actualité le rappelle régulièrement. Les « gilets jaunes » l’ont montré : une politique écologique est vouée à l’échec si elle ne tient pas compte de ses conséquences sociales ; à l’inverse une politique à courte vue de subventionnement des énergies fossiles ne peut que renforcer les problèmes climatiques à moyen terme. Les difficultés à relier les deux enjeux sont illustrées par la controverse entre Bruno Latour et Jürgen Habermas.

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Le premier reproche au second de ne se pencher que sur la communication et l’intersubjectivité, délaissant ainsi les interdépendances avec le monde matériel et les techniques. Cependant, à l’inverse, considérer l’écologie comme « la nouvelle lutte des classes » (Le Monde du 10 décembre 2021) peut induire une négligence des inégalités et injustices empruntant à d’autres registres.

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Ce désaccord sur les priorités entre les deux grands intellectuels souligne que la séparation de l’écologie et du social est profondément ancrée dans la coupure entre nature et culture héritée de la science classique. Or les partis ont tendance à éluder le caractère ardu de son dépassement. La « social-écologie » ou « l’éco-socialisme » ne se décrètent pas, pas plus qu’ils ne se réduisent à quelques mesures dans un programme électoral. Ils nécessitent l’ouverture d’un vaste chantier de réflexion.

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