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Il a fallu plusieurs minutes pour que Me Marilyne Secci traduise en anglais à l’accusé la peine pour laquelle il venait d’être condamné. Engoncé dans une doudoune noire, Kunti Kamara n’a esquissé aucune réaction. Après neuf heures de délibéré, la cour d’assises de Paris a suivi les réquisitions du ministère public en condamnant, mercredi 2 novembre, l’ancien commandant rebelle à la réclusion criminelle à perpétuité pour des « actes de barbarie » commis pendant la première guerre civile au Liberia (1989-1996) et s’être rendu « complice de crimes contre l’humanité » en cautionnant les viols d’Esther N. et Rebecca K. Les deux femmes étaient venues du Liberia témoigner à la barre du tribunal et identifier l’accusé.
« Des témoins ont fait le déplacement pour être entendus. Ils avaient soif de justice et la France vient de leur rendre [justice], a déclaré Alain Werner, directeur de Civitas Maxima, une ONG suisse à l’origine de la plainte déposée en 2018 contre Kunti Kamara. Ce verdict donne de l’espoir à toutes les victimes du Liberia, et tant d’autres partout dans le monde. Il prouve que si elles s’organisent, se regroupent et recueillent des preuves crédibles, elles peuvent obtenir la reconnaissance de leur souffrance. » L’avocate de l’ex-commandant rebelle a annoncé jeudi 3 novembre son intention de faire appel.
Ce procès historique, le premier en France pour des exactions perpétrées au Liberia, où la justice n’a jamais été rendue, s’est tenu en vertu de la « compétence universelle » qui permet de juger des crimes graves où qu’ils aient été commis, lorsque le suspect est interpellé sur le territoire français. En 2018, Kunti Kamara avait été arrêté à Bobigny (Seine-Saint-Denis) alors qu’il tentait de fuir vers le Portugal avant, très probablement, de s’envoler vers la Guinée.
Un accusé qui se dit victime de « complot »
Parce que les faits sont anciens et qu’au moment de la première guerre civile, « le Liberia ne connaissait que le chaos et la dévastation », selon les mots de l’avocate générale Claire Thouault, l’accusé a été condamné sans preuves matérielles mais sur la base de témoignages. La cour, composée de trois magistrats professionnels et de six jurés, a estimé que les douze témoins et huit parties civiles l’ayant formellement identifié étaient dignes de foi.
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