Les frasques de Hockey Canada entourant la gestion déficiente de troublants cas de violences sexuelles ont valu à l’organisation de perdre 24 millions en commandites et l’ont poussée à balancer 1,6 million en gestion de crise.
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L’information a été révélée mardi midi, lors d’une quatrième comparution de Hockey Canada devant le Comité permanent du patrimoine canadien, à Ottawa.
Des partenaires majeurs, soit Nike, Bauer, Tim Hortons, Canadian Tire, Esso, Pepsi, Telus et plusieurs autres, ont choisi de retirer leur appui financier depuis l’été dernier.
Cette fois, c’était au tour de Bob Nicholson, ancien président-directeur général chez Hockey Canada de 1998 à 2014, ainsi que de Pat McLaughlin, actuel vice-président senior, d’être bombardés de questions par les élus siégeant au comité.
Depuis juin, Hockey Canada est dans l’eau chaude concernant des allégations d’agressions sexuelles impliquant des joueurs de l’équipe canadienne junior, lors d’événements survenus en 2018 et en 2003.
« Nous vous avons entendus. Hockey Canada doit changer et c’est urgent. Les Canadiens s’attendent à des gestes significatifs et ils le méritent. Notre organisation, bien honnêtement, a été trop lente à réagir », a admis McLaughlin.
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1,6 million en gestion de crise
Éclaboussé de toutes parts depuis des mois, Hockey Canada a par ailleurs admis, par l’intermédiaire de McLaughlin, avoir eu recours à la firme de gestion de crise Navigator pour la rondelette somme de 1,6 million.
L’entreprise aurait commencé à travailler avec Hockey Canada dès le 8 juillet, et l’organisme ne cesse de s’empêtrer dans des controverses depuis.
McLaughlin a néanmoins décrit cette somme en gestion de crise comme un « investissement », spécifiant au passage que les fonds publics n’avaient pas été utilisés dans cette démarche.
« Nous avons pu obtenir leurs conseils en ce qui concerne notre gouvernance et notre façon de travailler au quotidien avec les médias », a-t-il justifié.
En octobre, la présidente intérimaire du conseil d’administration de Hockey Canada, Andrea Skinner, avait pourtant pointé du doigt les médias en les accusant de désinformation. De plus, un sondage interne demandait aux membres si les médias n’avaient pas amplifié toute l’affaire.
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Retour vers la lumière ?
Sans parler de grandes révélations, les deux représentants de Hockey Canada appelés à témoigner devant le comité ont au moins jeté les bases d’une nouvelle conversation publique plus transparente, aux yeux des élus impliqués.
« Leurs réponses étaient rafraîchissantes d’honnêteté », a conclu l’élu libéral Anthony Housefather, tandis que le représentant du Bloc Québécois Sébastien Lemire a parlé d’une « rencontre constructive et intéressante ».
Quant au représentant néo-démocrate Peter Julian, il a préféré rester sur ses gardes.
« La confiance du public s’est complètement érodée dans les derniers mois. Aujourd’hui, nous avons eu quelques réponses, mais le jury délibère toujours sur Hockey Canada », a-t-il prévenu.
Des remords pour Bob Nicholson
L’une des figures les plus importantes dans l’histoire de Hockey Canada, Bob Nicholson, admet qu’il aurait dû en faire plus pour protéger les victimes de crimes sexuels lorsqu’il était à la barre de l’organisation pendant de nombreuses années.
Nicholson a été PDG de 1998 à 2014. Sous sa gouverne, Hockey Canada a pris une expansion importante sur le plan financier, notamment grâce à de lucratifs contrats de télévision et de commandite.
Toutefois, il a été le premier à affirmer devant le Comité permanent du patrimoine canadien qu’il n’a pas été suffisamment proactif pour prévenir les scandales qui ternissent aujourd’hui l’image de l’organisation.
« J’aimerais pouvoir revenir en arrière. J’aurais dû mettre en place plus de lignes de conduite. Mon travail était de diriger les opérations et de telles lignes de conduite venaient du conseil d’administration, mais je ne veux pas blâmer le conseil.
« J’aurais dû encourager la mise en place de règles de conduite. Je ne l’ai pas fait et j’en suis désolé », a-t-il expliqué.
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À huis clos
Questionné à savoir si Hockey Canada, au fil du temps, avait géré correctement les incidents d’inconduite sexuelle, Nicholson, qui occupe aujourd’hui le rôle de PDG des Oilers, admet qu’il y aurait eu intérêt à rendre le tout public.
« D’un point de vue légal, tout a été fait dans l’ordre, mais en bout de ligne, nous n’avons pas fait les choses correctement parce qu’il y a eu trop de huis clos », a-t-il souligné au sujet des réunions qui n’ont pas fait l’objet de procès-verbal.
Fonds dénoncés
Nicholson a par ailleurs indiqué qu’il assumait l’entière responsabilité concernant la création de trois fonds distincts qui ont servi à régler des ententes à la suite d’inconduite sexuelle touchant Hockey Canada.
« Le but était de s’assurer que nous avions suffisamment de réserves si quelque chose de drastique devait arriver à Hockey Canada », a-t-il dit en ajoutant que les détails concernant l’utilisation des fonds étaient laissés entre les mains des membres du personnel d’assurance.
Quant aux événements qui seraient survenus en 2003 sous sa gouverne à Halifax, Nicholson a indiqué qu’il n’avait eu vent des rumeurs qu’au repêchage le 7 juillet dernier à Montréal et qu’il avait parlé avec Hockey Canada le lendemain. La police de Halifax n’a pas communiqué avec lui.
« Ces allégations, que ce soit celles de 2003 ou 2018, sont un outrage. Il n’y a pas de place pour de telles choses dans notre sport et en société », a-t-il mentionné.