David Lemieux avait la voix blanche quand je lui ai parlé hier midi : « Je suis pas mal en état de choc », a-t-il dit d’abord. « Apprendre que ton père est mort en se faisant tirer en attendant l’autobus, c’est tout un choc », a-t-il repris.
Le matin même, il avait passé un bref message sur Instagram pour faire connaître le tragique événement. Avec une photo de son père, André Lemieux. Puis, en avant-midi, il a visité sa grand-mère pour la réconforter : « Tout le monde dans la famille est bouleversé », a-t-il ajouté.
On a jasé un peu. David était plus proche de son beau-père, avec qui il a grandi, mais il rencontrait son père de temps à autre. Et là, sans avertissement, peut-être juste par un hasard épouvantable, ses enfants perdaient un de leurs grands-pères.
Difficile de rester stoïque.
LA PEINE DE CAMILLE ESTEPHAN
Camille Estephan, d’abord gérant et ensuite promoteur de Lemieux, lui a parlé à plusieurs reprises dans la journée. David Lemieux occupe une place spéciale dans le cœur d’Estephan. Comme l’a dit Estephan, David, c’est de la famille : « David est solide, mais ce sont des événements qui marquent », a-t-il dit en raccrochant, après avoir parlé une autre fois à son boxeur.
En fait, tous ceux qui connaissent le moindrement Lemieux ont été estomaqués en apprenant la nouvelle révélée par Le Journal. Plusieurs se demandaient quels étaient les motifs de ces deux meurtres.
En fait, André Lemieux aurait été victime d’un meurtre gratuit. Comme ce fut le cas du jeune Daniel Desrochers il y a 25 ans, alors qu’une voiture piégée avait explosé lors de la guerre entre les Hells et les Rock Machine pour le contrôle du trafic de la drogue à Montréal.
LA RÉACTION DES AUTORITÉS
Il y a 25 ans, la mort de l’enfant avait révolté la population et incité les dirigeants du Québec à s’attaquer sérieusement aux bandes de motards.
Photo tirée de Facebook, David Lemieux
André Lemieux a été abattu en pleine rue mardi soir.
La mort d’André Lemieux et d’une autre victime a soulevé hier beaucoup d’indignation. Si on se met à tirer au hasard dans les rues de Valérie Plante, la population ne peut plus se sentir en sécurité dans la ville. Les gens commencent à parler fort et à exprimer leur crainte et leur colère. C’est là que les politiciens trouvent habituellement un peu de courage.
Mais ça ne redonnera pas un père à un ancien champion du monde…
Spencer classée no 1
Photo courtoisie, Eye of the Tiger Management, Denis Germain
Il y a de ces combats qui devraient se faire. Jean Pascal contre Adonis Stevenson, on en a rêvé pendant deux ans. Il n’a jamais eu lieu même si Jean Pascal a lancé dix défis à Stevenson.
Mary Spencer contre Marie-Ève Dicaire, on en rêve comme on rêvait à Jean Pascal contre Lucian Bute. Si ce n’était que de Camille Estephan et de Mary Spencer, on aurait ce combat comme cadeau de Noël.
Hier, l’International Boxing Federation, la IBF, a installé Mary Spencer comme aspirante numéro un au titre de Marie-Ève Dicaire. La IBF est sans doute la fédération la plus sérieuse des quatre « majors » et exige rapidement une défense de titre contre son numéro un qui devient automatiquement une défense obligatoire.
La porte de sortie pour Marie-Ève Dicaire qui lui permettrait d’éviter Mary Spencer est un combat d’unification de titres contre une autre championne : « Les objectifs de Marie-Ève Dicaire sont d’aller de l’avant. Nous travaillons très fort et croyons réussir dès cet automne à offrir un combat d’unification à Marie-Ève », a réagi Yvon Michel.
AMENEZ LES CEINTURES !
Camille Estephan n’en a rien à cirer des esquives du clan Dicaire : « Tant mieux, si Marie-Ève Dicaire peut gagner une autre ceinture, ça va nous faire plaisir de toutes les rafler le même soir », dit-il en parlant de Mary Spencer.
Mary Spencer, qui vit à Montréal avec sa conjointe, a fait un bond gigantesque en crédibilité en assommant en moins de deux minutes Chris Namus. Celle-ci avait perdu un combat en dix rounds contre Marie-Ève Dicaire le 1er décembre 2018 au Centre Vidéotron.
Yvon Michel n’est vraiment pas pressé pour une défense de titre contre Mary Spencer. Et si jamais, au début de 2023, la IBF l’exigeait formellement, on pourrait organiser le combat : « Mais c’est moi qui ai la championne. Il faudrait que Camille Estephan accepte de voir une de ses athlètes participer à une promotion organisée par GYM. On l’a vu avec Simon Kean contre Oscar Rivas, il a rejeté l’idée », de dire Yvon Michel.
« Ce n’est pas vrai, je n’ai jamais reçu d’offre pour Simon Kean, » soutient Estephan.
Ça confirme que si le combat allait aux enchères, ça jouerait très corsé…
PAS PEUR DU TOUT
De nombreux observateurs croient que Marie-Ève Dicaire aimerait mieux prendre sa retraite que d’affronter Spencer. Yvon Michel balaie ces histoires du revers de la main : « Marie-Ève est allée affronter Claressa Shields à Flint, une ville toffe dans le Michigan et elle n’a pas eu peur. Ce n’est pas Mary Spencer à Montréal qui va l’épeurer », de dire Michel.
Quel que soit le promoteur, quel que soit l’endroit au Québec, Dicaire contre Spencer va intéresser et passionner les fans de boxe. Et le grand public aussi.
C’est justement ce dont a besoin la boxe au Québec.
