La rémunération des dirigeants des sociétés cotées est déterminée par le conseil d’administration de l’entreprise. Depuis la loi Sapin II en 2016, les actionnaires peuvent s’y opposer s’ils la jugent abusive.
« Je suis un salarié comme un autre ». Interrogé mardi sur sa rémunération en tant que PDG de Stellantis, Carlos Tavares s’est défendu de tout abus en assurant que les 19 millions d’euros qu’il a perçus en 2021 étaient « la traduction du fait que les résultats de l’entreprise sont bons, voire très bons (…) ». Dans le même temps, le patron de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, se disait « fatigué » des attaques l’accusant de s’être « augmenté de 52% » l’an passé.
« Ce n’est pas moi qui fixe ma rémunération », a notamment rappelé le PDG du groupe pétrolier. Le Code de commerce français prévoit en effet qu’il revient aux conseils d’administration de fixer la rémunération des dirigeants des grandes sociétés anonymes comme TotalEnergies.
Cette rémunération peut se composer d’une part fixe et d’une part variable (bonus) annuelles. Le versement de cette dernière étant conditionné à la réalisation d’objectifs aussi bien quantitatifs que qualitatifs. Evoquant sa rémunération, Carlos Tavares a ainsi assuré que celle-ci « résultait d’une décision du conseil d’administration de (son) entreprise ». « Je suis un salarié comme un autre, donc j’ai une prestation, un salaire variable à 90%. Le board décide un certain nombre d’objectifs, ils sont tenus, l’entreprise paye », a-t-il déclaré.
Les dirigeants des grandes entreprises peuvent également bénéficier de stock-options, d »actions gratuites, de « jetons de présence », voire d’autres éléments comme les « retraites chapeau », les indemnités de rupture de contrat, etc.
« Say on pay »
Les rémunérations des dirigeants des grandes entreprises privées ne sont pas plafonnées, contrairement à celles des patrons des entreprises publiques (450.000 euros brut par an maximum). Leur encadrement a malgré tout été renforcé ces dernières années pour tenter de limiter les abus. En 2003, la loi NRE votée deux ans plus tôt a instauré une obligation de transparence sur la rémunération des dirigeants des grandes sociétés cotées. Concrètement, le rapport de gestion présenté chaque année aux actionnaires lors des assemblées générales doit désormais détailler l’ensemble des éléments de rémunération ainsi que les avantages de toute nature versés à chacun des mandataires sociaux.
Sous pression du gouvernement de l’époque, l’Association française des entreprises privées (AFEP) et le Medef ont renforcé dix ans plus tard leur code de gouvernance en introduisant le « say on pay » consistant à soumettre au vote des actionnaires la rémunération des dirigeants lors de l’assemblée générale.
C’est ainsi que les actionnaires de Renault ont rejeté en 2016 la rémunération de Carlos Ghosn, alors PDG, Renault, fixée à 7,2 millions d’euros pour l’année 2015. Une décision qui n’a pas empêché le conseil d’administration de la valider. Et pour cause, le vote des actionnaires était à l’époque purement consultatif.
Vote contraignant
Face à la polémique déclenchée par le salaire de Carlos Ghosn, mais aussi par celui de Carlos Tavares, le gouvernement a décidé de sévir. En 2016, la loi Sapin II a donné davantage de pouvoir aux actionnaires des sociétés cotées. Depuis l’entrée en vigueur de ce texte, leur vote en assemblée générale sur les rémunérations des dirigeants de l’année écoulée comme des années à venir est contraignant. En cas de désapprobation, seule la part fixe est versée.
Voilà pour le droit français. La règle n’est cependant pas toujours la même chez nos voisins. Carlos Tavares en sait quelque chose. En avril dernier, une majorité d’actionnaires s’étaient exprimés contre le rapport sur les rémunérations chez Stellantis. Un avis seulement consultatif, selon les principes du droit des Pays-Bas, où est enregistré le constructeur né de la fusion des groupes Peugeot-Citroën-Opel et Fiat-Chrysler.