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accusé de racisme, de sexisme et de misogynie, Robert Sarver se résigne à vendre les Suns de Phoenix

accusé de racisme, de sexisme et de misogynie, Robert Sarver se résigne à vendre les Suns de Phoenix


Le propriétaire des Suns de Phoenix, Robert Sarver (au centre), le 15 décembre 2018, lors d’un match NBA.

C’est la fin d’un feuilleton qui dure depuis presque un an. Robert Sarver, propriétaire des Suns de Phoenix et du Phoenix Mercury, a annoncé, mercredi 21 septembre, qu’il allait vendre ses deux franchises NBA et WNBA. « Je vais commencer le processus de recherche d’acheteurs pour les franchises des Suns et du Mercury », a fait savoir l’homme d’affaires américain dans un communiqué, regrettant que « dans notre climat actuel qui ne pardonne rien », « tout le bien que j’ai pu faire ou que je peux toujours faire pèse moins lourd que les choses que j’ai pu dire par le passé ».

Depuis novembre 2021, le propriétaire des deux équipes de basket-ball fait l’objet d’une attention particulière. Une longue et accablante enquête publiée sur le site du média sportif ESPN décrivait alors un environnement de travail toxique entretenu par le management de M. Sarver. « Le niveau de misogynie et de racisme dépasse toutes les bornes », avait déclaré l’un des copropriétaires de la franchise, interrogé par le magazine américain.

Parmi les révélations du magazine, l’emploi à de plusieurs reprises du mot « nègre », par M. Sarver, qui est blanc. « Ces nègres ont besoin d’un nègre », avait-il notamment dit à propos de ses joueurs pour expliquer pourquoi il avait préféré engager un entraîneur noir plutôt qu’un entraîneur blanc, en 2013. Une ancienne employée se souvient, par ailleurs, que Robert Sarver employait fréquemment des phrases du type « Est-ce que tu m’appartiens ? Est-ce que tu es une des miennes ? » : « Vous avez l’impression de lui appartenir », expliquait-elle. D’autres racontent la brutalité de ses méthodes, ce que M. Sarver admettait de ses propres mots au fil des années. Selon ESPN, Robert Sarver avait dit à des cadres qu’ils étaient « payés très cher pour supporter ses conneries ».

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Dans la foulée de ces révélations, la NBA évoquait des « allégations extrêmement sérieuses » et annonçait qu’elle allait lancer sa propre enquête, dirigée par un cabinet d’avocats. Il aura fallu plus de dix mois pour que le rapport soit finalement publié, mardi 13 septembre. Ainsi, l’enquête conclut que Robert Sarver « s’est livré à une conduite qui violait clairement les normes communes du lieu de travail. Cette conduite comprenait l’utilisation d’un langage insensible au contexte racial ; un traitement inégal des employées de sexe féminin ; des déclarations et comportements liés au sexe ; et un traitement sévère des employés qui constituait parfois de l’intimidation ».

Sanction et critiques

La NBA a alors décidé de suspendre Robert Sarver pendant un an, lui a infligé une amende de 10 millions de dollars (le maximum autorisé par les règles en place, précise-t-elle) et lui a imposé de suivre une formation « axée sur le respect et sur une conduite appropriée sur le lieu de travail ».

Pas suffisant pour beaucoup. « C’est à peine une petite tape sur la main », regrette l’un des soixante-dix employés interrogés par ESPN, en 2021. De son côté, un vice-président des Suns de Phoenix a rapidement appelé à la démission de M. Sarver. « Je ne peux pas ne rien faire et laisser nos enfants et les futures générations de fans penser que ce comportement est toléré grâce à la richesse et aux privilèges », a écrit Jahm Najafi, le 15 septembre. L’un des sponsors de l’équipe, PayPal, a également menacé de mettre fin à son partenariat si M. Sarver revenait après sa suspension.

La plus grande star de la NBA, LeBron James, y est aussi allé de sa critique, estimant la sanction bien trop faible compte tenu des faits reprochés : « Notre ligue s’est trompée. Je l’ai déjà dit et je le répète, il n’y a pas la place dans cette ligue pour ce genre de comportement. Pas de place pour la misogynie, le sexisme et le racisme sur aucun lieu de travail, quel qu’il soit. » La star de Phoenix, Chris Paul, estime également être « de ceux qui pensent que les sanctions ne sont pas assez lourdes pour répondre à ce que l’on peut tous qualifier de comportement abominable ».

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Rapidement, certains ont fait un parallèle avec le cas Donald Sterling et ont appelé, ici aussi, à déposséder M. Sarver de sa franchise. En 2014, des propos racistes tenus par le propriétaire des Clippers de Los Angeles avaient été diffusés par le site américain TMZ. La NBA avait alors promptement réagi en infligeant à M. Sterling une suspension à vie, l’empêchant ainsi d’avoir tout lien avec la NBA ou sa franchise, une amende de 2,5 millions de dollars et avait recommandé un changement de propriétaire. Quelques semaines plus tard, leur vœu était exaucé.

Un départ plutôt qu’une éviction

Mais, huit ans plus tard, la NBA n’a pas appelé à un changement de propriétaire du côté de Phoenix. Le 14 septembre, le commissaire de la ligue, Adam Silver, distinguait les deux cas par « l’esprit » des commentaires de M. Sarver, arguant que si l’enquête avait permis de découvrir « que sa conduite était motivée par une animosité raciale, cela aurait eu un impact sur la sanction finale. Mais ce n’est pas ce qui a été découvert ». Par ailleurs, notait-il, en réponse à la question du changement de propriétaire, lui seul n’a « pas le droit de lui retirer son équipe ».

Car Donald Sterling n’a jamais été forcé de revendre les Clippers en 2014 par la NBA. C’est sa femme, Shelly Sterling, qui a pris cette décision, tirant avantage du fait que plusieurs experts ont estimé que son mari était en incapacité de gérer les affaires familiales. Les Clippers avaient ensuite été revendus pour 2 milliards de dollars à l’ancien directeur général de Microsoft, Steve Ballmer.

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Sans cela, la seule voie de recours aurait été de passer par un vote du conseil des gouverneurs (composé des trente propriétaires) pour forcer la vente de la franchise. Pour y arriver, les trois-quarts d’entre eux (23) doivent voter en faveur de l’exclusion.

C’est précisément ce qu’a demandé Draymond Green, le joueur des Warriors de Golden State, dans son podcast, au sujet de Robert Sarver, afin de savoir « qui est à nos côtés et qui ne l’est pas. (…) Votons, voyons quels sont les chiffres ».

Une façon de mettre les vingt-neuf autres propriétaires de franchises au pied du mur dans une ligue qui se veut comme étant la plus en pointe sur ces questions parmi les grandes ligues sportives américaines. Tout en sachant que pousser l’un de leurs congénères vers la sortie pourrait aussi revenir à ouvrir une boîte de Pandore. « Si vous êtes propriétaire d’une franchise NBA, vous pouvez regarder l’affaire Sterling et vous dire que vous ne feriez jamais une chose pareille, analyse la journaliste Seerat Sohi. Mais dans le cas de Sarver, vous vous demandez s’il y a des cadavres dans votre placard ou des choses qui pourraient vous faire tomber à votre tour si ce précédent venait à être établi. »

L’annonce, mardi soir, de la future vente des Suns de Phoenix et du Mercury, leur a probablement retiré une épine du pied. Dans la foulée, le patron de la NBA s’est limité à un communiqué de deux lignes sur le sujet : « Je soutiens pleinement la décision de Robert Sarver de vendre les Suns de Phoenix et le Mercury. C’est la bonne décision pour l’organisation et la communauté. »



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