Le Sénat commence l’examen en première lecture du budget rectificatif, lundi 1er août, avec un débat attendu sur la question d’une taxation des superprofits des grands groupes. Si les échanges devraient être moins tendus qu’à l’Assemblée nationale, le calendrier est serré : deux jours en séance publique, lundi et mardi, nuits comprises.
Poursuite du bouclier tarifaire sur l’énergie et de la remise carburant à 30 centimes le litre en septembre-octobre puis 10 centimes en novembre-décembre, revalorisation du point d’indice des fonctionnaires… Le projet de loi de finances rectificative pour 2022 ouvre 44 milliards d’euros de crédits, dont 9,7 milliards pour financer la renationalisation à 100 % d’Electricité de France (EDF).
Les sénateurs n’échapperont pas, par ailleurs, au débat sur la taxation des superprofits. Rejetée de peu par les députés, elle a été relancée par les énormes bénéfices engrangés par TotalEnergies, mais aussi Engie et les transporteurs comme CMA CGM. TotalEnergies a plus que doublé son bénéfice net au deuxième trimestre, à 5,7 milliards de dollars.
L’idée d’une contribution exceptionnelle sous forme de taxe, comme appliquée en Grande-Bretagne ou en Italie, sera portée par la gauche, mais aussi par le groupe centriste. Son président, Hervé Marseille, vaut faire entendre ses « marqueurs », quitte à « diverger » avec Les Républicains (LR), première composante de la majorité sénatoriale de droite.
« On a une vision plus sociale que budgétaire », a-t-il déclaré à l’Agence France-Presse (AFP). Son groupe proposera la mise en place d’une contribution exceptionnelle de solidarité sur les superprofits à 20 %. Même avec le soutien de toute la gauche, la supertaxe ne devrait cependant pas, sauf surprise, être votée.
Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, s’y est vivement opposé ces dernières semaines, arguant qu’« une taxe n’est pas une réponse à la situation économique de notre pays » – M. Le Maire a même critiqué le « réflexe pavlovien » que constituait, selon lui, l’idée d’une nouvelle taxation face à la crise. La ministre déléguée au commerce, Olivia Grégoire, a, pour sa part, renvoyé la question à la fin d’année, « si on se rend compte que les entreprises n’ont pas pris leurs responsabilités à l’endroit des Français ».
Affectation provisoire d’une partie de la TVA à l’audiovisuel public
Autre point attendu de discussion, la suppression de la redevance audiovisuelle. La gauche s’y oppose et les centristes demandent qu’elle soit différée. Sans la remettre en cause, le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (Les Républicains), propose de borner au 31 décembre 2024 l’affectation d’une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) destinée à assurer le financement de l’audiovisuel public, le temps de mettre en place « une véritable réforme du secteur ».
Le groupe LR va également revenir à la charge sur les heures supplémentaires, souhaitant pérenniser la hausse à 7 500 euros du plafond de défiscalisation, votée par l’Assemblée nationale pour 2022. Le Sénat aura, par ailleurs, à cœur de pousser un peu plus loin le curseur des mesures de soutien aux collectivités, elles aussi touchées par l’inflation, le rapporteur général souhaitant « un filet de sécurité ».
En commission, les sénateurs ont encore adopté une enveloppe « exceptionnelle de 40 millions d’euros » pour les banques alimentaires. Ils ont aussi remplacé la prime de rentrée exceptionnelle de 100 euros, réservée aux minima sociaux, par une majoration exceptionnelle de 150 euros aux bénéficiaires de la prime d’activité.
Concernant le prix des carburants, M. Husson n’entend pas revenir sur le compromis trouvé par le gouvernement avec les députés Les Républicains. « On ne va pas rajouter de la confusion à un accord sorti d’un bras de fer », a-t-il déclaré à l’AFP. Bruno Le Maire a souhaité pouvoir « préserver ce compromis », précisant qu’avec les remises des distributeurs et des pétroliers, « nous pouvons avoir un prix du litre d’essence ou de diesel à la rentrée autour de 1,50 euro ».
Le Sénat a déjà voté vendredi soir en première lecture, après l’avoir amendé, le projet de loi d’« urgence » en soutien au pouvoir d’achat adopté à l’Assemblée. Députés et sénateurs se réuniront lundi en fin d’après-midi en commission mixte paritaire pour tenter de s’accorder sur une version commune de ce premier volet de mesures, le gouvernement tablant sur une adoption définitive des deux textes au plus tard le 7 août, ce qui permettrait aux parlementaires de partir en vacances.