Cinq enfants de plus du défunt président gabonais Omar Bongo Ondimba, dont sa fille aînée, Pascaline, ont été mis en examen à Paris dans le dossier des « biens mal acquis », soupçonnés d’avoir profité du patrimoine immobilier « frauduleusement » acquis en France par leur père. Cette nouvelle série porte à au moins neuf le nombre d’enfants d’Omar Bongo, demi-frères et demi-sœurs de son fils et successeur à la tête du pays, Ali Bongo, poursuivis dans cette information judiciaire menée par un juge financier parisien.
Pascaline Bongo, 66 ans, ex-directrice de cabinet de son père ; Omar Denis Jr Bongo, 28 ans, également petit-fils du président congolais, Denis Sassou Nguesso ; Jeanne Matoua, 38 ans ; et Joseph Matoua, 40 ans, ont été mis en examen entre juin et juillet, selon une source judiciaire à l’Agence France-Presse (AFP), confirmant, vendredi 29 juillet, une information du site Africa Intelligence. Ils sont poursuivis pour recel de détournement de fonds publics, corruption active et passive, blanchiment et abus de biens sociaux.
La justice française les soupçonne d’avoir « sciemment » bénéficié d’un important patrimoine immobilier « frauduleusement » assemblé en France par le patriarche, président du Gabon de 1967 jusqu’à sa mort, en 2009. La valeur de ces biens a récemment été évaluée par la justice « à au moins 85 millions d’euros ».
Pour l’avocate de Pascaline Bongo, Me Corinne Dreyfus-Schmidt, il y a dans cette procédure « un anachronisme tant juridique que factuel ». Selon des éléments obtenus par l’AFP, Pascaline Bongo a déclaré devant les enquêteurs en janvier 2020 posséder, entre autres, plusieurs appartements dans des quartiers chics de Paris, acquis par son père des années 1970 à 1990. Très proche de son père, elle en fut la directrice de cabinet au Palais du bord de mer de Libreville, le siège de la présidence.
Avocat d’Omar Denis Jr Bongo, Me Jean-Marie Viala a contesté auprès de l’AFP la mise en examen de son client « sur la base du droit », « non de la morale ».
D’autres enfants déjà mis en examen
Entre mars et avril, le juge financier parisien Dominique Blanc avait déjà mis en examen Grâce, Betty, Arthur, puis Hermine Bongo, d’autres enfants du défunt président. Ces quinquagénaires ont tous contesté avoir eu connaissance du caractère frauduleux de cette fortune. D’autres enfants, parmi les 54 de l’ex-partenaire historique de la France en Afrique centrale, pourraient suivre.
La « fortune immense » de la famille Bongo, selon un arrêt de février de la cour d’appel de Paris, provient « de l’argent issu de détournements de fonds publics et des sommes considérables provenant du délit de corruption des sociétés pétrolières », notamment Elf Aquitaine, aujourd’hui TotalEnergies. Ce que « les investigations menées dans la présente procédure ont confirmé », selon le magistrat instructeur.
« C’est tout un clan familial qui va devoir rendre des comptes », a réagi auprès de l’AFP Me William Bourdon, avocat de Transparency International France, partie civile dans le dossier. « Les bénéficiaires, y compris français, ont été épinglés ; ce qui permettra un panorama judiciaire complet. Chacun doit mesurer les montants colossaux qui sont en cause », a-t-il ajouté.
Dans cette enquête déclenchée à la suite d’une plainte d’ONG, en 2007, outre des enfants Bongo et la BNP Paribas, au moins quatorze autres personnes physiques sont poursuivies, dont des membres de la famille du président Sassou Nguesso, et plusieurs ressortissants français, parmi lesquels un avocat, un notaire ou une gérante de société civile immobilière (SCI).
« Cela ne concerne ni le président de la République, ni aucun membre de présidence de la République gabonaise, donc il n’y a pas à commenter », a déclaré Jessye Ella Ekogha, porte-parole de la présidence gabonaise, sollicité par l’AFP. « Cependant, il apparaît que les médias ont adopté comme stratégie marketing d’associer systématiquement le chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba, à une affaire pour laquelle il n’a jamais été inquiété, ni entendu. Cela doit cesser », a-t-il ajouté.
Chef de l’Etat en exercice, Ali Bongo bénéficie d’une immunité et ne risque donc pas de poursuites dans l’immédiat.