Jeff Gorton affirmait, récemment, dans le cadre d’une entrevue que le Canadien n’était pas nécessairement dans une période de reconstruction parce qu’il y avait parmi les effectifs des patineurs talentueux, doués, capables de contribuer largement à la relance de la concession.
Mais, il est aussi réaliste. Quand on se voit confier une entreprise avec un passé historique, quand on fait le tour de la propriété, on sait qu’il y aura des modifications à apporter.
Comment procédera-t-on ?
En haussant le budget ? En adaptant l’entreprise à une nouvelle technologie de gestion au niveau des effectifs et également au niveau des différents départements ?
Jusqu’à maintenant, Gorton et son partenaire de gestion, Kent Hughes, ont respecté les échéanciers.
On a confirmé que Martin St-Louis serait au gouvernail de l’équipe au cours des trois prochaines saisons.
On a apporté des changements chez les recruteurs. On a créé un département dont la spécialité sera les statistiques avancées. On va prochainement nommer un nouvel entraîneur adjoint.
Le département des relations publiques et des médias a subi des changements qui s’imposaient.
Et, sur le plan du personnel des joueurs, quelques vétérans ont quitté le navire. On a amorcé le virage en confiant des responsabilités à des patineurs pas très expérimentés et on se propose de poursuivre cette politique dès l’automne prochain.
Besoin de flexibilité
Jusqu’à maintenant, on peut, à la lumière des actions prises par les décideurs, reconnaître qu’on suit à la lettre le modèle d’affaires concocté par le duo Gorton/Hughes.
Mais le plus difficile est à venir. Un plan de relance doit aussi comporter de la flexibilité au niveau du budget et des engagements financiers. On doit écarter les contrats qui viennent entraver ce plan.
Comment progresser rapidement quand on n’a pas d’espace de manœuvre pour embaucher un joueur de premier plan ?
Comment peut-on composer avec un plafond salarial causant des embûches plutôt que de fournir des solutions pratiques et importantes pour la relance de l’entreprise ?
Si Gorton et Hughes ont fait beaucoup de vagues à la séance de repêchage des joueurs amateurs, ils ont été plutôt discrets à l’ouverture du marché des joueurs autonomes sans restriction.
Corriger les erreurs du passé
D’une part, ils n’avaient plus les moyens pour dépenser et également parce qu’ils ont choisi, avec justesse, de résoudre les problèmes à l’interne.
Donc, il faut parvenir à corriger les erreurs de l’ancienne administration au niveau des engagements financiers. Un exercice colossal.
Voici des contrats qui causent bien des soucis aux administrateurs.
BRENDAN GALLAGHER, 30 ans
6,5 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2026-2027
Il a récolté 14 buts et neuf mentions d’aide la saison dernière. En 2019-2020, il avait inscrit 22 buts et amassé 21 passes en 59 matchs. Un joueur passionné, mais qui, au fil des dernières saisons, a été ralenti par les blessures. Il a connu ses meilleures saisons aux côtés de Phillip Danault sauf qu’on réalise chez Gallagher que les ressources s’amenuisent. Y a-t-il une équipe qui pourrait s’intéresser à Gallagher ? Sûrement, mais le Canadien serait dans l’obligation de payer un haut pourcentage du salaire de cet ailier.
MIKE HOFFMAN, 32 ans
4,5 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2023-2024
Voilà un joueur qui n’avait pas trouvé preneur jusqu’à ce que Marc Bergevin lui propose un contrat de rêve, 13,5 M$ pour trois ans. Mais, à travers la ligue, on connaît les forces et les faiblesses de Hoffman. Au niveau de la protection défensive, il est très vulnérable. En attaque, il peut donner un peu de lustre à l’attaque à cinq, mais le jeu collectif n’appartient pas tellement à son vocabulaire. Y a-t-il un intérêt pour un joueur commandant un salaire beaucoup trop élevé pour ce qu’il peut apporter à l’équipe ? Peut-être une équipe qui recherche un joueur lui permettant d’atteindre le plancher salarial.
PAUL BYRON, 33 ans
3,4 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2022-2023
Il est sérieusement incommodé par une blessure. On croit même qu’il pourrait mettre fin à sa carrière. Il ne cadre plus dans les plans de la formation et s’il parvient à renouer avec la compétition, il aura du mal à percer la formation actuelle. Évidemment, Kent Hughes ne prévoit pas une offre de la part d’une autre équipe. Le Canadien devra donc se contenter de compléter la présente entente, donc un engagement de 3,4 M$ pour la prochaine saison. Pour l’instant, c’est l’inconnu relativement aux plans de l’organisation et relativement au joueur lui-même. On attendra au début du camp d’entraînement avant de se prononcer, et les médecins auront également un verdict à rendre.
JOEL ARMIA, 29 ans
3,4 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2024-2025
Un joueur énigmatique. À Winnipeg, il occupait un poste au sein de la quatrième ligne d’attaque, incapable de gravir les échelons au sein d’une formation misant sur plusieurs attaquants talentueux. Chez le Canadien, parfois, il a démontré de belles choses. Il possède un solide gabarit et son entraîneur peut l’utiliser dans différentes situations. Le problème, c’est qu’il manque trop souvent de combativité. Il peut connaître de très longues séquences sans parvenir à faire la différence. Pour une équipe qui tente d’atteindre les séries, il peut être un candidat à la date limite pour conclure des transactions. Mais attention, il a encore deux ans à écouler à son entente et ça pourrait refroidir les ardeurs des directeurs généraux.
CHRISTIAN DVORAK, 26 ans
4,45 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2024-2025
Un cas particulier. Peut-on dire que la dernière saison a permis à Dvorak de démontrer ce qu’il peut apporter à l’équipe ? Il a raté 26 matchs, il a terminé la saison avec 11 buts et 22 passes pour 33 points. C’est un joueur qui mérite d’être connu davantage. Il a gagné graduellement la confiance de Martin St-Louis. Si on pense l’utiliser comme joueur de centre du troisième trio, c’est intéressant, d’autant plus qu’il s’améliore constamment dans le cercle des mises en jeu et qu’il peut évoluer autant en supériorité numérique qu’en infériorité numérique. Sur le marché des transactions, il peut assurément attirer l’attention de quelques formations en raison de sa polyvalence et de son âge. Le Canadien devrait lui donner l’opportunité de disputer une autre saison avec la formation.
JONATHAN DROUIN, 27 ans
5,5 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2022-2023
On croyait que le Canadien avait réalisé un bon coup en échangeant Mikhaïl Sergachev au Lightning de Tampa Bay pour les services de Jonathan Drouin qui venait de compléter une saison de 53 points. Sauf que les blessures et d’autres événements ont nettement faussé la donne. Une fiche de 15 buts et 43 passes en 105 matchs au cours de trois dernières saisons. Rien pour justifier une telle transaction puisque le défenseur du Lightning occupe un poste de premier plan avec Tampa Bay et que Drouin n’a jamais réussi à s’imposer avec le Canadien. Que faire ? Espérer qu’il va retrouver tous ses moyens. Il ne lui reste qu’une seule saison à son entente et il n’a que 27 ans. Sauf que Drouin n’a plus d’option. Il doit répondre aux attentes.
JOSH ANDERSON, 28 ans
5,5 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2026-2027
Un joueur dont le nom a fait l’objet de plusieurs rumeurs au cours des dernières semaines, et ce n’est pas étonnant. Gabarit impressionnant, rapide patineur, un attaquant de puissance, un joueur qui peut exercer un impact majeur pendant les séries éliminatoires. Un bon leader également. Son contrat est imposant, et ça invite les directeurs généraux à la prudence. Peut-on embarquer dans un tel investissement en sachant que le joueur peut parfois connaître de longs moments sans marquer ? Dix-neuf buts en 69 matchs l’an dernier, c’est peu. Un différentiel de -35 au cours des deux dernières saisons. Il a toutefois ravi le poste d’ailier droit dans le top six à Gallagher, et c’était à prévoir. À moins d’une offre alléchante, le Canadien va se montrer très prudent dans les négociations avec les autres formations du circuit.
CAREY PRICE, 34 ans
10,5 M$ par saison
Jusqu’à la fin de 2025-2026
À partir de l’an prochain, le salaire de Price variera entre $7,5 M$ et 8,5 M$, mais on devra inscrire un montant de 10,5 M$ sur le plafond salarial. Il est le plus haut salarié de l’équipe. Depuis la première année de son entente en 2018-19, il a disputé 149 matchs. Au cours des trois dernières années, il a joué 88 parties, cinq l’an dernier. Blessures et problèmes personnels ont soulevé plusieurs interrogations sur l’impact de Price au sein du Canadien. Celui qui célébrera son 35e anniversaire le mois prochain, peut-il encore aider son équipe ? Oui. Le problème, c’est qu’on ne sait pas s’il sera en mesure de justifier un tel salaire. Veut-il poursuivre au sein d’une équipe en période de reconstruction ? Encore là, il y a lieu de se poser la question. Un contrat tellement imposant que l’on ne croit pas chez les décideurs qu’on pourra échanger le gardien. Mais, on ne sait jamais. Donc, il y a la retraite, ou encore, placer son nom sur la liste des blessures pour longtemps.