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Entre l’Etat français et les sociétés d’autoroutes, un absurde contentieux fiscal

Entre l’Etat français et les sociétés d’autoroutes, un absurde contentieux fiscal



Les relations entre l’Etat et les sociétés concessionnaires d’autoroutes sont souvent comparées aux Shadoks et aux Gibis. Le contentieux fiscal sur l’indexation de la taxe d’aménagement du territoire (TAT) en est une parfaite illustration. Cela peut sembler compliqué, mais en réalité, c’est simplement une longue tradition établie par l’Etat qui tire de l’argent des autoroutes chaque fois qu’il a besoin d’argent. Les autoroutes négocient toujours une contrepartie, de taxes en contreparties, cela aboutit à un millefeuille incompréhensible.

Afin de comprendre le litige sur la TAT, il est essentiel d’évoquer une autre taxe acquittée par les sociétés d’autoroutes, la CVE, pour contribution volontaire exceptionnelle. En 2015, l’Etat cherchait plusieurs centaines de millions d’euros pour indemniser discrètement la société Ecomouv’, celle qui avait installé sur les autoroutes les portiques destinés à collecter l’écotaxe. La taxe a été abandonnée fin 2014 à la suite du mouvement des « bonnets rouges ».

Les Sociétés des Autoroutes du Nord et de l’Est de la France (Sanef), Vinci, ou encore Autoroutes Paris-Rhin-Rhône (APRR) ont accepté de verser à l’Etat une somme annuelle de 60 millions d’euros pendant vingt ans, soit un total de 1,2 milliard d’euros. Bien sûr, elles ont négocié une contrepartie. Elles ont fait ajouter à leurs contrats une clause de neutralité fiscale. Cette subtilité avait été négociée par Elisabeth Borne, directrice de cabinet de Ségolène Royal au ministère de l’écologie, et Emmanuel Macron, ministre de l’économie, dans le cadre du plan de relance autoroutier de 2015 destiné à compenser le gel des tarifs des péages.

Devenu ministre des comptes publics, Gérald Darmanin avait sans doute oublié cette contrepartie lorsque, en 2019, il a pensé aux autoroutes pour trouver le milliard promis par la ministre des transports Elisabeth Borne au canal Seine-Nord. Par discrétion, il a été décidé de ne pas créer un nouvel impôt, mais d’indexer sur l’inflation la taxe d’aménagement du territoire, que les sociétés d’autoroutes payaient déjà et qui rapporte 700 millions d’euros par an (soit 7 % du montant des péages). Cette taxe est affectée à l’Agence de financement des infrastructures de transport pour financer le ferroviaire, les routes, ainsi que les voies navigables.

Le gouvernement a estimé que les autoroutes pouvaient supporter cette indexation, car elles ont bénéficié d’augmentations de tarifs supérieures à l’inflation depuis 2005. Les sociétés d’autoroutes ont accepté l’indexation de la TAT à une condition : que la clause de neutralité fiscale soit respectée. Cependant, certaines sociétés d’autoroutes ont accusé l’Etat de ne pas respecter cette clause, en prétendant que cette indexation représente une nouvelle taxe.

Les sociétés d’autoroutes ont été déboutées en première instance par le tribunal administratif et ont fait appel devant la cour administrative d’appel. Cette dernière a annulé le jugement du tribunal administratif, en considérant que l’indexation de la TAT constituait bien une rupture de la clause de neutralité fiscale. Cette décision a été confirmée par le Conseil d’Etat en juillet 2021, le gouvernement doit rembourser une partie de la TAT payée par les sociétés d’autoroutes depuis 2019. Ce dernier a proposé de régler ce litige en créant une nouvelle taxe sur les géants du numérique, mais cela n’a pas été accepté par les sociétés d’autoroutes.

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