Le Syndicat de la Rizerie Française craint une forte baisse de la production mondiale, notamment en raison des événements climatiques qui ont frappé les principaux pays producteurs ces derniers mois. Hausse de prix en perspective.
La filière sonne « l’alerte ». A en croire, le Syndicat de la Rizerie Française (SRF), de nombreux risques pèsent sur les futures approvisionnements en riz. Les difficultés pourraient survenir « à partir de février/mars, à l’arrivée des nouvelles récoltes », prédit Thierry Lievin, président du SRF. Au point de tomber sur des étals vides en grandes surfaces? Pas impossible: « S’il n’y a pas de ruptures complètes, il y aura au moins de fortes perturbations d’approvisionnement », prévient-il.
Si la France produit 50.000 tonnes de riz par an, elle en importe bien davantage pour satisfaire sa demande nationale (240.000 tonnes consommées en grandes surfaces). Mais cette année, plusieurs événements laissent penser que la production mondiale sera en nette baisse.
L’Inde restreint ses exportations
Toutes les variétés seront concernées. A commencer par le riz basmati, qui représente 45% de la consommation en grandes et moyennes surfaces. Les principaux producteurs que sont l’Inde et le Pakistan ont été touchés ces derniers mois par des épisodes de fortes chaleurs puis de fortes pluies qui auraient détruit au minimum 250.000 tonnes de riz ainsi que des infrastructures nécessaires au transport des marchandises (routes, ponts…).
Devant cette situation, l’Inde et le Pakistan vont « privilégier leur population » en limitant les exportations, explique Thierry Liévin. Or, le riz est d’ores et déjà « un produit qui voyage très peu, qui est essentiellement consommé sur place », poursuit le président du SRF, précisant que sur 580 millions de tonnes produites dans le monde, à peine plus de 50 millions sont exportées en temps normal, dont 21,5 millions par l’Inde.
L’Inde a d’ailleurs annoncé en septembre une série de restrictions en interdisant les exportations de brisures de riz (notamment utilisées pour nourrir le bétail en Chine) et en instaurant des droits de douanes à l’export de 20% sur le riz blanc et riz brun (complet). Très gourmand en énergie, le riz étuvé (technique évitant aux grains de coller entre eux à la cuisson) qui représente 40% de la consommation en grandes surfaces, devrait lui aussi voir sa production baisser en raison de la flambée des prix du gaz et de l’électricité qui n’épargne pas les producteurs asiatiques.
Même la production européenne inférieure à 3 millions tonnes par an (dont plus de la moitié est de l’arborio d’Italie utilisé pour la préparation du risotto) devrait être moindre: « L’eau a manqué tout au long du cycle végétatif du riz dans l’ensemble des pays européens (Italie, Espagne, Grèce) », indique le Syndicat de la Rizerie Française. « On s’attend à une diminution des rendements de 20 à 25% sur la production communautaire », estime Thierry Liévin.
Nouvelles hausses de prix à venir
La baisse de la production mondiale liée aux événements climatiques va mécaniquement renforcer les poussées inflationnistes déjà observées ces derniers mois. Outre la flambée des prix de l’énergie, la hausse des prix du blé et du maïs en raison de la guerre en Ukraine a poussé des pays comme la Chine à se reporter sur le riz brisé venu de Birmanie ou d’Inde pour nourir le bétail, « ce qui a eu un effet très haussier », rappelle Thierry Liévin.
A cela s’ajoute l’augmentation des droits de douane européen à l’importation des riz cargo de 30 à 65 euros la tonne, depuis le 1er septembre. Mais aussi le renforcement du dollar par rapport aux autres devises: « Cela nous coûte très cher quand on importe parce qu’on achète les marchandises en dollars et on les revend en euros », souligne Thierry Liévin. Après avoir été mulitpliés par cinq depuis la crise sanitaire, les coûts de transports, eux, se « stabilisent », assure le président du SRF. Mais « on a encore beaucoup de mal à trouver des conteners en quantité suffisante », déplore-t-il.
Au total, les industriels du riz ont déjà vu leurs coûts bondir de 30% en un an. Côté consommateurs, les prix en rayons ont augmenté de plus de 12% en septembre par rapport à l’an passé, selon l’Insee. A ce stade, toutes les hausses de coûts n’ont donc « pas été répercutées parce qu’il y avait de la marchandise en stocks », indique Thierry Liévin. Mais « il y a encore des hausses à passer », prévient-il.