Il a reçu une fin de non-recevoir : dépêché en Guadeloupe pour négocier avec les « suspendus », ces soignants non vaccinés écartés de leur poste sans salaire depuis plus d’un an, le directeur du cabinet du ministre délégué aux outre-mer a reconnu, vendredi 14 octobre, qu’il avait échoué à remplir sa mission.
Syndicats de personnels et collectifs de « suspendus » ont rejeté la « sortie de crise » suggérée par Joël Mathurin. Sont concernés, selon le ministère, 221 soignants recensés par l’agence régionale de santé, dont 93 travaillaient au CHU de Guadeloupe – ils seraient 160 à l’hôpital en Martinique, une centaine d’hospitaliers et de libéraux en Guyane. A Pointe-à-Pitre, le cabinet de Jean-François Carenco a proposé un « plan de départ exceptionnel », au moyen de ruptures conventionnelles majorées. Il a offert de multiplier par trois les indemnités de départ, « à 40 000 euros minimum », pour envisager des « reconversions ». Des préretraites, dérogatoires, étaient aussi sur la table.
Mais les personnels s’en tiennent à une exigence, leur réintégration, moyennant des tests PCR réguliers et le respect des gestes barrières. Avec 50 % de la population et 80 % des soignants vaccinés (contre 85 % et 99 % respectivement dans l’Hexagone), la Guadeloupe, comme la Martinique et la Guyane, affiche sa forte spécificité. Dans le département, les pompiers, non-vaccinés à 60 %, travaillent quand même, dans le cadre d’un protocole sanitaire strict.
« Une catastrophe d’incompréhension »
Le Covid-19 et la question vaccinale ont été au cœur des manifestations violentes qui ont secoué l’île, en novembre 2021. Sur fond de crise sociale, le sujet sanitaire a aussi beaucoup pesé dans les scores exceptionnels réalisés par La France insoumise (LFI) et le Rassemblement national dans les outre-mer lors des dernières élections présidentielle et législatives. « Cette problématique est un marqueur politique fort. En outre-mer, aucun député de la majorité présidentielle n’a été élu, le gouvernement ne peut ignorer cette défiance politique », rappelle le député (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) Olivier Serva qui, en comptant les infirmiers libéraux et le secteur médico-social, évoque 1 500 personnes concernées en Guadeloupe.
Le ministre Jean-François Carenco avait répété devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, le 28 septembre, vouloir « construire une solution ». « On parle de moins de 200 personnes si on ne prend que les salariés. Ce n’est pas une catastrophe, mais c’est une catastrophe d’incompréhension de part et d’autre », avait-il reconnu. Reste que toutes les autorités sanitaires – conseil scientifique, Haute Autorité de santé, Académie de médecine – ont jusqu’à présent refusé que les soignants dérogent à l’obligation vaccinale. Les « suspendus » seraient 2 000 à 3 000 à l’échelle nationale.
Il vous reste 35.9% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.