Cette semaine, la populaire émission STAT, diffusée à Radio-Canada, a remis à l’avant-scène une maladie mentale méconnue du grand public: le syndrome de Münchhausen. Mais que sait-on réellement de ce syndrome potentiellement mortel? Une psychiatre répond à nos questions.
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Qu’est-ce que le syndrome de Münchhausen?
Une personne atteinte du syndrome de Münchhausen (SM), aussi appelé «trouble factice», simule les signes et les symptômes d’une maladie pour avoir l’attention des médecins.
Mais prenez garde: il y a bien évidemment une différence entre simuler un mal de ventre pour manquer une journée de travail ou d’école et de souffrir du SM, insiste la Dre Claire Gamache, présidente de l’Association des médecins psychiatres du Québec (AMPQ).
«C’est un trouble mental morbide, qui mène à un besoin morbide de simuler une maladie jusqu’à se faire [du mal]», explique-t-elle.
Dans certains cas, une personne atteinte du SM peut aller jusqu’à se rendre volontairement malade, poursuit la Dre Gamache. Elle se souvient, par exemple, d’un patient qui s’était injecté des bactéries dans l’articulation du genou, toujours avec l’objectif d’attirer l’attention des médecins.
Qu’est-ce que le syndrome de Münchhausen par procuration?
Dans la série STAT, le personnage est atteint du syndrome de Münchhausen par procuration (SMPP), une autre forme du même trouble.
Plutôt que de simuler les signes et symptômes d’une maladie, une personne qui souffre du SMPP va les simuler chez une autre personne. Généralement, c’est la mère qui se sert de son enfant pour être prise en charge à l’hôpital dans l’espoir qu’on s’occupe d’elle, explique la Dre Gamache.
«Elles vont souvent se cacher par honte, parce qu’elles le savent qu’elles font du tort à leur enfant, mais elles ne comprennent pas pourquoi elles le font», souligne-t-elle.
Comment ce syndrome est-il déclenché?
La Dre Gamache affirme que les personnes atteintes du SM ou du SMPP ont souvent été malades pour vrai dans leur enfance ou à un certain moment dans leur vie, et donc soutenues par des proches. Une fois guéries, elles peuvent en venir à manquer de ce soutien et de cette attention.
Il s’agit donc d’un trouble psychologique profond qui pousse une personne à s’organiser pour se faire soigner et avoir l’attention du personnel hospitalier, parce qu’elle est incapable de s’imaginer vivre autrement.
Le cas de STAT est-il plausible?
Dans la série, une femme, qui est elle-même préposée aux bénéficiaires, empoisonne son mari dont elle s’occupe depuis des mois. Elle diffuse également des vidéos sur les réseaux sociaux, dans lesquelles elle divulgue des détails sur l’état de santé de son mari, tout ça dans le but d’attirer l’attention du public… en plus de celle du personnel hospitalier.
«C’est sûr que c’est STAT et que c’est tiré par les cheveux, mais ça fait partie des choses qu’on peut voir à l’occasion», soutient la Dre Claire Gamache.
Elle a d’ailleurs récemment entendu parler d’un cas similaire dans lequel une personne atteinte de SMPP se servait des réseaux sociaux et de l’état de santé d’un proche pour attirer l’attention.
Comment le syndrome est-il diagnostiqué?
C’est le psychiatre qui peut diagnostiquer le SM, avec l’appui des médecins qui font les tests nécessaires pour prouver que la personne n’est atteinte d’aucune maladie.
Ce syndrome peut d’ailleurs avoir des conséquences dramatiques, puisque les personnes qui en souffrent peuvent se faire du mal, devenir «malade pour vrai» et même en mourir.
Est-ce qu’il existe des traitements?
Il n’existe aucune médication pour traiter le SM, même si certains traitements peuvent, par exemple, être prescrits pour diminuer l’anxiété d’une personne qui en est atteinte.
À force d’entretenir une relation malsaine avec le système de la santé, la personne atteinte du SM pourrait elle-même en venir à demander de l’aide, mentionne la Dre Gamache. Elle pourrait alors être suivie par un psychiatre ou un médecin de famille avec énormément d’empathie, qui pourrait l’accompagner et développer un lien de confiance, poursuit-elle.
«Ça va probablement aider, mais c’est très très très difficile», souligne-t-elle.
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Mais qui est Münchhausen?
Selon l’encyclopédie Britannica, le syndrome doit son nom à l’Allemand Karl Friedrich Hieronymus Freiherr von Münchhausen, dit baron de Münchhausen, né en Basse-Saxe en 1720 et décédé en 1797.
Officier dans l’armée de l’empire russe, il est connu pour avoir raconté des aventures «extraordinaires» inspirées de sa vie de soldat. Ces récits lui ont valu une réputation de fabulateur et de menteur.
C’est un médecin britannique, le Dr Richard Asher, qui aurait donné le nom de Münchhausen à la pathologie, dans les années 50. Il se serait souvenu de l’histoire du célèbre Baron après être tombé sur des patients qui simulaient des maladies pour avoir une attention médicale.
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