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Sébastien Raoult, Français incarcéré au Maroc, menacé d’extradition aux Etats-Unis où il risque une lourde peine

Sébastien Raoult, Français incarcéré au Maroc, menacé d’extradition aux Etats-Unis où il risque une lourde peine


D’après son avocat, il risquerait une peine de 116 ans de prison aux Etats-Unis pour les faits qui lui sont imputés. Sébastien Raoult, un Français de 21 ans, est incarcéré depuis plus de deux mois à la prison de Tiflet 2, près de Rabat, au Maroc, sur demande des autorités américaines. Recherché par le FBI pour des faits de cybercriminalité contre des entreprises américaines, le jeune homme faisait l’objet d’une fiche rouge Interpol émise par un procureur de l’Etat de Washington. En France, le père de Sébastien, Paul Raoult, reste convaincu de l’innocence de son fils et livre une bataille médiatique et judiciaire pour empêcher son extradition outre-Atlantique.

Originaire d’Epinal (Vosges), Sébastien Raoult était en deuxième année d’études à Epitech, une école d’informatique à Nancy (Meurthe-et-Moselle). Spécialisé en technologies de l’information, en programmation, en cybersécurité et en blockchain, il avait décidé d’arrêter sa formation en décembre dernier. D’après son père, il serait entré « dans une phase de rupture avec les études » : « Il avait envie de vivre, de découvrir le monde et de voyager et avait l’impression de perdre son temps à l’école. » Le jeune Français séjournait au Maroc lorsqu’il a été arrêté. Arrivé au terme de son visa touristique de trois mois, il s’apprêtait à embarquer pour Bruxelles lorsqu’il a été interpellé à l’aéroport de Rabat-Salé le 1er juin 2022 en raison de la fiche rouge Interpol dont il faisait l’objet.

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Soupçonné de cybercriminalité par le FBI

Selon les informations recueillies par L’Obs, qui a révélé l’affaire, le FBI soupçonne le jeune homme d’être un membre important des ShinyHunters, un groupe de hackers considérés par les autorités américaines comme « des cybercriminels prolifiques ». Ce collectif de pirates informatiques dont le nom fait référence à l’univers des Pokémon se serait formé en 2020 et est soupçonné d’avoir hacké 200 millions de données d’une douzaine de grandes entreprises, comme la firme américaine Microsoft ou Tokopedia, un acteur de l’e-commerce en Indonésie, avant de les revendre sur le dark Net ou de demander des rançons à ses cibles. Toujours selon L’Obs, Washington réclame l’extradition de Sébastien Raoult pour des faits de « complot en vue de commettre une fraude et abus électronique », « fraude électronique » et « vol d’identité grave ».

Ces infractions auraient été commises à partir d’adresses IP françaises, mais aussi plus récemment marocaines, qui seraient reliées à Sébastien Raoult. Les enquêteurs américains auraient également mis la main sur des conversations en ligne attribuées au Français dans lesquelles il évoquerait lesdits piratages.

« On ne recherche pas l’impunité »

« Il nie fermement les faits et affirme que ses comptes ont été utilisés à son insu », relate à nos confrères de l’Obs le père de Sébastien Raoult. « Cela fait deux mois qu’il mange par terre à même le sol. Deux mois qu’il dort sans matelas », a-t-il également dénoncé en conférence de presse, mardi. « Dans cette situation-là, c’est une victime », a-t-il enfin affirmé au micro d’Europe 1, mardi 2 août.

« Les déclarations du père du détenu en question sont des contre-vérités », a répondu une source de la délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR) du Maroc, affirmant qu’il « jouit à l’instar des autres détenus de tous ses droits ». « Il dispose d’un lit et partage avec sept codétenus une cellule de huit lits. Ses repas lui sont servis sur plateau », a ajouté la même source.

D’après son avocat, MPhilippe Ohayon, le jeune homme risque une peine de 116 ans de prison aux Etats-Unis pour les faits qui lui sont attribués, dénonçant un « traitement inhumain et dégradant » en raison de la peine encourue. « La demande d’extradition soumise par les Etats-Unis revient de fait à l’exposer à une peine d’emprisonnement perpétuel prohibée par l’article 3 de la CEDH [Convention européenne des droits de l’homme] », affirme-t-il. Me Ohayon estime que la procédure concernant son client contient des violations « de la souveraineté française sur son territoire » et du « principe de procès équitable ». Selon lui, en France, les infractions reprochées seraient passibles d’un maximum de cinq ans de prison.

Me Ohayon a demandé l’extradition de Sébastien Raoult en France auprès du procureur de la République d’Epinal, là où une partie des faits auraient été commis : « Nous sollicitons que des poursuites soient engagées en France concernant les faits reprochés et l’émission d’une demande d’extradition à son encontre » a-t-il avancé. « On ne recherche pas l’impunité, nous demandons seulement à être jugés là où nous pouvons nous défendre. »

Une demande d’entraide pénale a été adressée par les Etats-Unis à la France l’été dernier à propos des ShinyHunters, a indiqué une source proche du dossier à l’Agence France-Presse (AFP). Plusieurs interpellations et auditions ont eu lieu concernant des personnes soupçonnées d’être impliquées de près ou de loin dans ce réseau, sans autre suite judiciaire à ce stade.

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« Nous n’avons pas la possibilité à ce stade d’intervenir »

Le procureur de la République a néanmoins décidé de rejeter cette demande d’ouverture d’enquête préliminaire, « au motif que le territoire des Vosges n’aurait aucune compétence pour traiter ce dossier », a expliqué en conférence de presse Me Ohayon. Pour l’avocat, « on a exporté clé en main un dossier français qui aurait dû relever d’un juge d’instruction français ».

Selon lui, « les pièces américaines démontrent en tout point qu’il est compétent ». Et de souligner que « le mandat d’arrêt américain donne comme adresse l’adresse de Sébastien à Epinal ». Le parquet d’Epinal a toutefois confirmé mardi à l’AFP avoir reçu de nouveaux éléments de la part de l’avocat, éléments qui « vont également être étudiés ».

Paul Raoult demande que la première ministre, Elisabeth Borne, se saisisse du dossier en prenant contact avec les autorités américaines. « Mon fils a été trahi par la France », a-t-il accusé, critiquant un « déni de justice » et demandant que l’extradition de son fils vers les Etats-Unis soit empêchée. Il a également enjoint le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, de sortir de « son mutisme », en intervenant auprès des autorités marocaines dans le cadre d’une demande d’extradition.

« La justice marocaine a été sollicitée par la justice américaine et nous n’avons pas la possibilité à ce stade d’intervenir », a répondu mercredi Eric Dupond-Moretti, questionné à ce sujet par BFM-TV à l’issue d’une visite à Marseille à la prison des Baumettes. Le garde des sceaux a affirmé que la justice marocaine était « souveraine et indépendante » mais que le ministère des affaires étrangères était « mobilisé sur cette question ».

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