L’occasion était trop belle. Hors de question pour Rachida Dati de la laisser passer. Mi-novembre, la maire (Parti socialiste) de Paris, Anne Hidalgo, dont elle est la principale opposante (Les Républicains, LR) à l’Hôtel de ville et dont elle convoite la succession, annonce une hausse de la taxe foncière dans la capitale. En pleine séance, l’ex-garde des sceaux se lève, et lance : « Nous ne serons pas complices de ce braquage. » Elle sort, suivie de tout son groupe. Le boycott ne dure que vingt-quatre heures.
Il n’empêche, l’action a un retentissement certain. Le lendemain, Mme Dati est de retour et s’en prend directement à l’édile. « Vous avez décidé de manière un peu honteuse, de manière un peu cachée, par un tweet, une augmentation de 52 % de la taxe foncière. Mais quel mépris, mais quel irrespect », lâche-t-elle, entre autres « punchlines » qui sont devenues sa marque de fabrique. Aussitôt postées, partagées et diffusées sur les réseaux sociaux.
Cultivant un certain sens de l’autodérision, aiguisant aussi une repartie à toute épreuve, Mme Dati a su adapter son discours et sa méthode à l’esprit d’un temps gourmand en expressions retentissantes. Parfois – souvent même –, c’est aux dépens de sa propre famille politique de droite, comme lorsqu’elle attaque frontalement sur un plateau de télévision Patrick Stefanini, directeur de la campagne de Valérie Pécresse, à l’époque candidate de LR à l’élection présidentielle.
Une attitude qui séduit jusqu’à plusieurs de ses adversaires, qu’on pourrait imaginer rebutés par les sorties d’une femme politique résolument de droite, notamment sur les questions de sécurité. Il fallait voir l’accueil chaleureux qui lui a été fait, fin août, lors des « amphis », les universités d’été de La France insoumise (LFI). Invitée à s’exprimer sur la justice, l’ancienne garde des sceaux a « retourné » la salle, mettant les rieurs de son côté, débordant de son temps de parole lors du débat avec le député (LFI) du Nord Ugo Bernalicis. « Certes, elle est de droite, mais ce n’est pas Eric Ciotti, souligne le parlementaire. Je n’étais pas étonné de l’accueil car avant le débat, on me demandait des autographes d’elle. »
M. Bernalicis rappelle également les « très bons liens » qui unissent Mme Dati et Jean-Luc Mélenchon, tissés du temps où ils étaient tous les deux députés européens. Il ajoute : « Le style de Rachida Dati peut se rapprocher de celui de Jean-Luc : franc, brut de décoffrage, qui va au carton. » Sur la figure de proue des « insoumis », pourtant à l’autre bout du spectre politique, Rachida Dati elle-même ne tarit pas d’éloges : « J’ai toujours aimé échanger avec lui. Il a une vraie sensibilité. » Entre eux, pas de « coups de fil » ni de « déjeuners », précise-t-elle, mais une reconnaissance mutuelle entre deux personnes pleines « d’affect », notamment pour leurs proches. Contacté, M. Mélenchon n’a pas donné suite.
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