Vont-ils se quereller sur la feuille de route ? Les partenaires sociaux viennent de lancer une négociation « sur le partage de la valeur dans les entreprises », dont l’orientation est, d’entrée de jeu, matière à débats entre les protagonistes. Les syndicats aimeraient évoquer la question des salaires, le patronat s’y refuse.
Les discussions se sont ouvertes, le 8 novembre, sur proposition du gouvernement. Celui-ci a, en effet, voulu associer les organisations d’employeurs et de salariés à sa réflexion autour d’une promesse de campagne d’Emmanuel Macron : « Mieux vivre de son travail. » La loi relative à la protection du pouvoir d’achat, promulguée en août, constituait une première étape. L’exécutif entend aller plus loin aujourd’hui, dans un contexte où des millions de ménages peinent à joindre les deux bouts à cause de l’emballement des prix des produits de première nécessité.
A la mi-septembre, le ministre du travail, Olivier Dussopt, a invité les partenaires sociaux à parlementer, dans le but de conclure un accord national interprofessionnel (ANI) avec des mesures concrètes. Offre que les intéressés ont acceptée, tout en demandant à avoir un peu plus de temps que ce qui était envisagé au départ par le pouvoir en place. Les échanges devraient durer jusqu’à la fin janvier 2023 – soit trois mois supplémentaires par rapport au calendrier initialement esquissé.
Pour cadrer cet exercice, les services de M. Dussopt ont remis aux parties en présence un « document d’orientation » qui énonce des objectifs. Il s’agit de « faciliter le développement de l’ensemble des dispositifs de partage de la valeur, dont l’actionnariat salarié », mais aussi l’intéressement et la participation, en ayant « une attention particulière pour les entreprises de moins de 50 salariés ». Trois « axes » de réflexion sont tracés, « sans que cette liste soit limitative » : « généraliser le bénéfice » des mécanismes existants, simplifier et mieux articuler ceux-ci, « orienter l’épargne salariale vers les grandes priorités d’intérêt commun » (« investissements responsables et solidaires », actions en faveur de la « transition écologique »…).
« Il faut s’en saisir »
Lors de la réunion du 8 novembre, tous les syndicats « ont émis le souhait d’élargir le champ de la négociation en y intégrant les salaires », rapporte Karen Gournay (FO). « Ils ne peuvent pas être escamotés si on cherche à traiter la question du partage de la valeur dans son entièreté », souligne Raphaëlle Bertholon (CFE-CGC). Ce serait « une insulte au monde du travail » que de faire l’impasse sur un tel aspect du dossier, renchérit Boris Plazzi (CGT) : « L’augmentation des salaires constitue l’une des premières préoccupations des salariés, il faut s’en saisir. » La CFDT, par la voix de Luc Mathieu, y ajoute d’autres thématiques : les inégalités entre les femmes et les hommes du point de vue de la rémunération, la « transparence fiscale » – ce qui renvoie notamment aux procédés utilisés par certaines entreprises pour déplacer d’une filiale vers une autre les profits qu’elles créent…
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