L’Assemblée nationale pourra-t-elle tenir ainsi pendant cinq ans ? D’un scrutin historique pour inscrire l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution à une séance dantesque sur la réintégration des soignants non vaccinés au Covid-19, la journée consacrée aux textes de La France insoumise (LFI), jeudi 24 novembre, s’est révélée être la quintessence d’un monde parlementaire réticent à changer de paradigme depuis les législatives de juin.
La proposition de loi constitutionnelle portée par la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, pour inscrire le droit à l’IVG dans la Loi fondamentale avait offert un moment de concorde au sein de cet Hémicycle dépourvu de majorité absolue, où les clivages n’ont jamais cessé de s’exacerber.
A l’issue de huit heures de débat, perturbées par l’obstruction du Rassemblement national (RN) et de la frange conservatrice du groupe Les Républicains (LR), la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes) et la coalition présidentielle sont parvenues à un terrain d’entente sur la formulation : « La loi garantit l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse ». La proposition de loi réécrite par LFI, le MoDem et les socialistes, qui modifie l’article 66 de la Constitution, a été adoptée en première lecture à une très large majorité, à 337 voix (32 contre et 18 abstentions).
Au moment du vote, seuls les groupes LR et RN se sont retrouvés divisés. Les élus de droite étaient, eux, favorables à inscrire dans la Constitution le droit à l’IVG, à condition que ne soient repris que les principes de la loi Veil de 1975, avec le délai – à quatorze semaines aujourd’hui – et la clause de conscience des professionnels de santé. « La formulation proposée à travers le texte (…) laisse à penser que l’IVG serait un droit inconditionnel et absolu sans que le législateur ne puisse fixer de bornes à ce droit », a déploré le député (LR) de l’Ain Xavier Breton.
Sur l’IVG, mettre la pression sur le gouvernement et le Sénat
Une fois leur proposition rejetée, une poignée de députés LR ont tenté à tout prix de ralentir les discussions à travers des amendements sur le retour du septennat ou la préservation des langues régionales.
Leurs collègues d’extrême droite ont pour leur part défendu des amendements sur la « préférence nationale » ou le « droit du sol », avant de finalement voter majoritairement le texte, consécutif à un énième revirement de la présidente du groupe, Marine Le Pen. « Un petit jeu d’obstruction parlementaire » dénoncé par le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, sur ce texte « plus que nécessaire en ces temps agités ».
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