Il ne sera finalement pas question de « partage de la valeur » durant les débats budgétaires au Sénat, qui se sont ouverts jeudi 17 novembre. En tout cas pas sur les bancs du parti présidentiel. Le dépôt d’un amendement au projet de loi de finances (PLF) 2023 sur le sujet, qui tenait encore la corde il y a quelques jours pour répondre au souhait d’Emmanuel Macron de mettre en place un « dividende salarié », promesse de campagne du chef de l’Etat, a finalement été abandonné.
L’eurodéputé Pascal Canfin, chargé au sein du parti Renaissance des relations avec le gouvernement, avait pourtant été mandaté sur le sujet des « superdividendes ». Il avait planché sur un mécanisme de « superparticipation » censé permettre de distribuer davantage aux salariés dans les entreprises ayant réalisé des profits exceptionnels. Une manière de répondre aux demandes sur un meilleur partage de la valeur, sans pour autant franchir la ligne rouge du gouvernement : taxer davantage les entreprises.
Un sujet politiquement inflammable
C’était compter sans l’opposition de Bercy. « Les partenaires sociaux sont actuellement en train d’en discuter. Nous verrons après leurs propositions », balaie le cabinet du ministre de l’économie, Bruno Le Maire, en référence aux négociations sur « le partage de la valeur dans les entreprises », qui se sont ouvertes la semaine dernière sous l’égide du ministre du travail, Olivier Dussopt.
Dans un contexte de flambée de l’inflation et de multiplication des revendications salariales, le sujet reste pourtant politiquement inflammable. Il est souvent mis en regard des « superprofits » réalisés par les multinationales à la faveur de la crise. Lors de l’examen du PLF en première lecture à l’Assemblée nationale, un amendement du chef de file des députés MoDem, Jean-Paul Mattei, proposant une taxation accrue des « superdividendes », avait été voté par 19 députés Renaissance, avant d’être balayé par le 49.3.
A l’initiative de M. Mattei, et malgré la fin de non-recevoir du gouvernement, une version « reformatée » – seuil relevé pour ne pas toucher les entreprises de taille intermédiaire (ETI), mais holdings incluses – de l’amendement a finalement été déposée au Sénat par plusieurs sénateurs centristes. « Je compte bien continuer de porter ce sujet », indique le député au Monde.
A Bercy, on préfère rappeler que les mécanismes existants – comme l’intéressement et la participation, ou la prime Macron – ont déjà été plusieurs fois assouplis, y compris dans la loi sur le pouvoir d’achat, votée cet été. De sorte que le sujet porte aujourd’hui moins sur les grands groupes, dont les salariés bénéficient déjà de la participation obligatoire (à partir de 50 personnes), que sur les TPE-PME. De plus, assure-t-on, l’amendement préparé par M. Canfin n’aurait pas pu être constitutionnellement accepté dans le PLF : il aurait fait figure de « cavalier budgétaire » car la participation relève du code du travail, pas d’une disposition fiscale.
Il vous reste 50.71% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.