Un tollé, du moins aux yeux des entreprises concernées. Depuis l’annonce du projet, fin septembre, le débat ne cesse de prendre de l’ampleur : le gouvernement norvégien de centre gauche veut imposer, dès janvier 2023, une nouvelle taxe de 40 % sur les rentes de l’aquaculture de truites et surtout de saumons, dont la Norvège est le premier producteur mondial.
Motif : il s’agit de l’exploitation d’une ressource naturelle commune – à savoir, l’accès aux fjords et eaux pour les parcs aquacoles, accordé par le biais de quotas –, dont les producteurs tirent profit. « L’aquaculture gagne des milliards de couronnes grâce à nos ressources communes. Le gouvernement propose qu’une part accrue de la valeur créée revienne à la société », souligne le ministère des finances dans un communiqué.
Dans la foulée de l’annonce, les titres des géants du secteur (les petites entreprises seraient épargnées par la taxe), comme Mowi, SalMar ou Grieg Seafood, ont aussitôt plongé de 20 % à 30 % à la Bourse d’Oslo. Selon eux, la nouvelle taxe porterait à 62 % le taux marginal d’imposition appliqué aux fermes de saumon, et beaucoup ont déjà annoncé qu’ils suspendraient des investissements prévus si elle entre en vigueur. « Le gouvernement veut massacrer l’une des industries les plus importantes pour l’avenir de la Norvège », s’est ému Geir Ove Ystmark, patron de la Fédération norvégienne des produits de la mer.
« Large consensus »
Des réactions qualifiées de « presque hystériques » par le journaliste Harald Birkevold, dans un éditorial du quotidien Stavanger Aftenblad, publié le 12 octobre. Il y rappelle que John Fredriksen, le propriétaire de Mowi, numéro un mondial du secteur, « s’est depuis longtemps fait naturaliser chypriote pour éviter de payer l’impôt sur le revenu en Norvège ». Et que l’industrie du saumon est, avec celle du pétrole, le plus puissant groupe de pression du pays. En outre, de larges déductions seront possibles en cas d’investissements, ce qui limite la portée de la taxe.
Au reste, les éleveurs de saumons ne sont pas les seuls concernés. Les producteurs d’énergie éolienne seront également taxés, et ceux d’hydroélectricité verront la taxe qu’ils paient déjà augmenter. Ce, pour le même motif : exploitation des ressources communes. L’ensemble du dispositif permettrait de lever 33 milliards de couronnes (3,2 milliards d’euros) de rentrées fiscales supplémentaires. De quoi faire en partie face à la hausse de 100 milliards de couronnes des dépenses attendues en 2023, notamment pour l’accueil des réfugiés ukrainiens et le soutien aux ménages face à la flambée du prix d’électricité.
Il vous reste 29.65% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.