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En Afrique subsaharienne, l’industrie pharmaceutique peine à recruter

En Afrique subsaharienne, l’industrie pharmaceutique peine à recruter


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Dans l’usine pharmaceutique Sogafam, au Gabon, le 4 mars 2005, à Owendo, au sud de Libreville.

L’Afrique ne produit que 3 % des médicaments qu’elle consomme. Si certains pays possèdent des unités de production comme l’Egypte, le Maroc, l’Afrique du Sud ou encore le Sénégal, cette dépendance extérieure s’est rappelée de manière dramatique aux gouvernements au moment de la pandémie de Covid-19. Le continent a été le grand perdant dans la course mondiale aux vaccins et aux médicaments.

Cet épisode a provoqué une prise de conscience sur la nécessité de produire davantage localement. La ratification du traité sur la création d’une Agence africaine du médicament qui traînait depuis deux ans a été bouclée en octobre 2021. Mais beaucoup d’obstacles doivent encore être surmontés pour renforcer la production pharmaceutique. A commencer par ceux liés au manque de compétences locales.

Master et alternance

« Le monde entier parle de l’industrialisation de l’Afrique et la volonté politique est là », estime Linda Bouboutou Kaboré, pharmacienne d’officine à Abidjan et présidente de la plateforme Africa Santé Expo. En Côte d’Ivoire, une loi sur l’installation des industries promulguée sous Félix Houphouët-Boigny, a été dépoussiérée l’an dernier pour exonérer les équipements et matériels nécessaires aux entreprises pharmaceutiques des droits de douane et de la TVA. « Ça a été une grande victoire pour nous, souligne la pharmacienne. Mais, pour l’heure, les industries qui commencent à s’installer sont étrangères et, sur le plateau technique, tout le personnel l’est aussi. »

Sur 3 000 pharmaciens inscrits à l’Ordre ivoirien, compte Linda Bouboutou Kaboré, 500 sont en liste d’attente pour ouvrir une officine. « Ils auraient pu être formés en pharmacie industrielle, en biologie, en cosmétologie, en pharmacie galénique, en phytothérapie. »

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Seulement deux formations de pharmaciens spécialistes de l’industrie pharmaceutique existent pour l’heure en Afrique subsaharienne francophone. La première est un master spécialisé, lancé en 2014 en Côte d’Ivoire par Armand Koffi, professeur titulaire de pharmacie industrielle et cosmétologie. Neuf promotions plus tard, il estime que 70 % des cadres pharmaciens employés dans l’industrie pharmaceutique en Côte d’Ivoire sont passés sur ses bancs. « Le master est difficile et le taux d’abandon avoisine les 30 %, mais les diplômés sont recrutés en flux tendu », rapporte-t-il. Un autre master a été mis en place à sa suite en 2017 au Burkina Faso, similaire quoique moins spécifiquement tourné vers la pharmacie industrielle.

Mais, par endroits, la machine s’enraie. D’abord du côté des opérateurs, destinés à travailler directement sur les machines, et pour lesquels il n’existe pas de formation spécialisée. « Pour eux, il y a un vide total », reconnaît Armand Koffi. Faute de plateformes techniques, ceux-ci ne peuvent pas être formés en école. Aussi le professeur espère-t-il pouvoir mettre en place l’an prochain des partenariats avec les unités de production, pour former ses élèves opérateurs avec leur matériel.

Cadres locaux experts

L’autre problème est le coût des formations, prohibitif : comptez 1,5 million de francs CFA (2 300 euros) pour cette spécialisation, qui ne bénéficie d’aucun système de bourses en Côte d’Ivoire. « Cela nous prive d’élèves méritants et volontaires, mais qui n’ont pas les moyens financiers pour s’inscrire, regrette Armand Koffi. Alors on essaie de mettre en place des alternances, comme cela se fait en France. Avec un peu de chance, dès l’an prochain ! »

Et pour ceux qui n’auront pas pu passer sur les bancs de ces deux écoles, reste à se former sur le tas. C’est ce qui s’est passé au Sénégal, témoigne Aboubacar Tio-Touré, pharmacien de formation et associé dans le cabinet Ylancia Conseil. Cet ancien directeur général de la branche Afrique subsaharienne de Sanofi a passé huit ans dans la gestion de l’usine de fabrication de médicaments du groupe à Dakar où, assure-t-il, « 99 % du personnel était sénégalais ». Le problème de recrutement était le même, à l’origine, mais « avec les formations internes du groupe et le recours à de la main-d’œuvre étrangère dans un premier temps, cela a permis d’avoir progressivement des cadres locaux experts qui ont pris la relève. »

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C’est également ce que devrait permettre l’implantation du chinois Fosun Pharma en Côte d’Ivoire. Le numéro 1 des fabricants d’antipaludéens a annoncé en mars dernier la construction d’une usine, dans la ville de Grand-Bassam. « Un investissement de 75 millions d’euros devrait lui être alloué sur 10 ans », explique Jean-Marc Bouchez, directeur général de la filiale du groupe pour l’Afrique francophone et président de l’Association des Industriels Pharmaceutiques en Afrique Francophone Subsaharienne (LIPA). Fosun ambitionne d’en faire la plus grande usine de production d’anti-infectieux d’Afrique francophone subsaharienne, « Pour ça, reprend-il, on vise des effectifs situés entre 800 et 1 000 employés, explique-t-il. Pour l’instant, nous en sommes très loin, mais nous espérons que cette perspective de débouchés incitera les étudiants à se spécialiser dans nos métiers ».

Article réalisé dans le cadre d’un partenariat avec Africa Santé Expo, qui se déroulera du 1er au 3 décembre 2022 à Abidjan.

Cliquez ici pour retrouver le programme. 

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