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Derrière le faste d’Astana, un Kazakhstan rongé par les inégalités

Derrière le faste d’Astana, un Kazakhstan rongé par les inégalités


« Bienvenue à Astana, la ville qu’on adore détester. » Ruslan Alieva fonce dans le vent froid d’octobre, le visage engoncé dans le col de son manteau : impossible de décrypter les émotions traversant son esprit, lorsqu’il prononce ces mots. Il a commencé son service de taxi il y a deux heures et s’apprête à repartir après une pause-café.

Il y a huit ans, ce trentenaire a quitté son village pour rejoindre la capitale kazakhe, des rêves plein la tête. « Je pensais faire fortune en trois ans. » Il travaille d’abord dans le bâtiment, fait venir sa famille, puis achète une voiture russe d’occasion pour devenir taxi. « Je bosse comme un fou, mais je ne suis toujours pas riche ! », s’exclame-t-il soudain, mi-amusé, mi-dépité, levant les yeux vers une immense tour de bureaux.

Lui vit dans la vieille partie soviétique de la ville, mais il travaille ici, dans le centre riche et clinquant, où il est sûr de trouver des clients. A sa droite s’élève le Bayterek, une haute structure semblable à un arbre en haut duquel trône une sphère dorée. Elle représente le mythe de Samrouk, l’oiseau kazakh pondant un œuf d’or tous les ans. « C’est notre tour Eiffel à nous, pour les touristes, dit-il en tentant d’allumer une cigarette, malgré la bise. C’est idiot, mais à chaque fois que je la regarde, je crois de nouveau aux belles promesses d’Astana. »

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Des promesses, la capitale kazakhe, oasis de verre et de béton perdu au milieu des steppes, en incarne plus d’une. Et pas seulement aux yeux des milliers de travailleurs venus des campagnes afin de mieux gagner leur vie, comme Ruslan Alieva. Elle est, avant tout, le visage moderne que le Kazakhstan, 19 millions d’habitants, souhaite offrir au monde, à grand renfort de prouesses architecturales.

Symbole de la ville d’Astana, situé dans un quartier ultramoderne, le Palais de la paix et de la réconciliation, est une pyramide de 62 mètres de haut, qui sert de centre spirituel national non confessionnel et de lieu d’événements.

A l’exemple du Palais de la paix et de la réconciliation, une pyramide à la silhouette ésotérique accueillant un centre œcuménique ; du palais présidentiel Ak Orda, une copie grandiloquente de la Maison Blanche coiffée d’une coupole azur ; ou du Khan Shatyr (« tente du souverain »), une gigantesque structure de thermoplastique et d’acier mimant la tente des anciens nomades, abritant boutiques et spas de luxe… Sans parler du ministère des finances, qui, vu du ciel, prend la forme d’un « $ », le dollar américain, symbole de la libéralisation de l’économie après 1991.

« L’idée était de bâtir une nouvelle vision du futur pour le pays »

Se promener dans les larges avenues d’Astana, c’est éprouver l’étrange sensation d’être quelque part entre New York, Dubaï et Moscou, avec une pointe d’Asie. « D’une certaine façon, cette ville est la Dubaï des steppes, et c’est avant tout un projet géopolitique », résume Pascal Lorot, représentant spécial du ministre des affaires étrangères pour la diplomatie économique en Asie centrale.

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