La République arabe syrienne fut, en 1945, un des six membres fondateurs de la Ligue arabe, où elle joua d’emblée un rôle actif. Cet engagement s’accentua sous le règne de Hafez Al-Assad qui, de 1970 à 2000, se posa en chef de file du nationalisme arabe, une dimension fondamentale pour la légitimation internationale de son absolutisme.
Son fils Bachar, en héritant du « trône » dictatorial de Syrie, se posa, lui aussi, en champion d’une « nation arabe unie, porteuse d’un message éternel », ainsi que le martelait la propagande officielle. C’est dire que l’exclusion de la Syrie hors de la Ligue arabe, en 2011, porta un coup sévère au discours d’autocélébration du régime Al-Assad. Ce n’était en effet pas « l’impérialisme » ou le « sionisme », vilipendés par les médias gouvernementaux, qui sanctionnaient ainsi le maître de Damas, mais bel et bien ses « frères » arabes. Une sanction qui, onze années plus tard, ne semble pas prête d’être levée.
Des griefs toujours valides
Contrairement au cliché qui verrait les seuls Occidentaux s’opposer à Bachar Al-Assad pour sa brutale répression des manifestations, initialement pacifiques, du printemps 2011, ce sont les Etats arabes qui se sont les premiers mobilisés collectivement pour mettre un terme au bain de sang. En octobre 2011, ils contraignent Al-Assad à s’engager à arrêter les violences, à libérer tous les détenus, à retirer les troupes et l’artillerie des villes syriennes, ainsi qu’à assurer la libre circulation des observateurs de la Ligue arabe et des médias internationaux.
La violation flagrante de tels engagements entraîne, dès le mois suivant, la suspension de la Syrie par la Ligue arabe. En janvier 2012, les Etats arabes se prononcent en faveur d’un transfert pacifique du pouvoir, Bachar Al-Assad remettant son autorité à son vice-président, chargé d’engager le dialogue avec l’opposition syrienne afin d’organiser des élections libres, supervisées par un gouvernement d’union nationale.
C’est ce « plan arabe de paix » qui, endossé par l’Assemblée générale de l’ONU en février 2012, constitue la base de la médiation confiée à Kofi Annan, jusqu’à ce que l’ancien secrétaire général de l’ONU, confronté au jusqu’au-boutisme d’Al-Assad, jette l’éponge à l’été suivant. La suspension temporaire de 2011 devient une exclusion durable de la Ligue arabe, même si plusieurs Etats arabes continuent d’avoir un ambassadeur à Damas.
C’est évidemment le cas du Liban, dont les relations sont trop intimes pour être ainsi rompues, sur fond d’engagement militaire du Hezbollah aux côtés du régime Al-Assad. Le même raisonnement prévaut pour l’Irak, dont la dépendance envers l’Iran lui interdit de boycotter le plus solide allié de la République islamique dans le monde arabe. Quant à l’Algérie, elle continue d’être séduite par la rhétorique « anti-impérialiste » en vogue à Damas.
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