La journée de lundi 24 octobre avait à peine commencé. Rishi Sunak n’était pas encore officiellement leader du parti conservateur – et donc nouveau premier ministre du Royaume-Uni – mais de la matinale radio de la BBC est arrivé un sérieux rappel de l’état extrêmement délicat dans lequel il trouve l’économie britannique. Guy Hands, pourtant un soutien de longue date du parti conservateur, à la tête de Terra Firma, une société de capital-risque qui gère des entreprises d’une valeur de 51 milliards d’euros, était interviewé, et il n’a pas pris de gants. « Il faut corriger les erreurs de ces six dernières années qui ont fait que le Royaume-Uni est sur la bonne voie pour être l’homme malade de l’Europe. »
Selon lui, il est impératif de « renégocier le Brexit », sinon, « on verra des impôts qui augmentent progressivement, des aides sociales et des services publics qui déclinent progressivement, et à la fin, un sauvetage du FMI comme dans les années 1970 ». Il faisait référence à l’intervention de 1976, quand le Fonds monétaire international avait dû débloquer ce qui était alors le plus important plan de sauvetage de son histoire.
Double crise
Ce scénario noir est loin d’être certain, mais le Royaume-Uni traverse à l’évidence une double crise politique et économique. Avec trois premiers ministres et quatre chanceliers de l’Echiquier depuis début juillet, l’instabilité politique est une évidence. Côté économie, le début de panique financière provoqué par le budget présenté par Liz Truss a jeté une lumière crue sur les sérieuses faiblesses du moment. La livre sterling était tombée au plus bas niveau de son histoire face au dollar et les taux d’intérêt des emprunts obligataires avaient fait un bond. Il a fallu l’intervention de la Banque d’Angleterre, l’annulation d’une large partie des baisses d’impôts promises par Mme Truss, et la nomination d’un nouveau chancelier de l’Echiquier, Jeremy Hunt, pour que le calme revienne sur les marchés.
Dans sa très courte allocution après sa victoire, M. Sunak a lui-même reconnu l’ampleur de la tâche. « Le Royaume-Uni est un pays formidable mais il ne fait aucun doute que nous faisons face à de profondes difficultés économiques. » Il fait face à un calendrier serré. Le nouveau budget, avec la présentation des grands équilibres budgétaires, est attendu dès lundi 31 octobre. Cette date avait été choisie par M. Hunt avant la démission de Mme Truss, et il semblerait que M. Sunak veuille s’y tenir.
Cette situation de crise n’est pas une particularité à tous égards du Royaume-Uni. Toute l’Europe est touchée par les difficultés liées à la pandémie puis à la guerre en Ukraine. L’envolée des prix du gaz cet été, suite à la coupure orchestrée par le président russe Vladimir Poutine, a encore accentué le coup de frein subi par toute l’économie, en particulier le secteur industriel. L’inflation au sein de la zone euro, à 9,9 %, est comparable à celle du Royaume-Uni, à 10,1 %.
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