Attendue depuis des années, Mathilde Gros a apporté vendredi 14 octobre à la France sa première médaille d’or aux Championnats du monde sur piste à Saint-Quentin-en-Yvelines dans le même vélodrome où auront lieu les Jeux Olympiques dans moins de deux ans. C’est le premier sacre mondial pour la Provençale de 23 ans, grand espoir du sprint depuis les juniors, et elle l’a décroché dans l’épreuve-reine : la vitesse.
Et ce triomphe, elle ne l’a pas volé, après avoir dominé à elle seule la puissante équipe allemande. D’abord, en demi-finales, en éjectant du tournoi la double tenante du titre, Emma Hinze, malgré la perte de la première manche. Elle a remis ça pour l’or en ne laissant aucune chance à Lea Sophie Friedrich, cette fois en deux matches secs pour vivre le plus beau jour de sa vie sur un vélo.
Mathilde Gros, née dans le Pas-de-Calais mais qui a grandi dans les Bouche-du-Rhône, a découvert le cyclisme par hasard il y a huit ans alors qu’elle était apprentie basketteuse de haut-niveau et rêvait de paniers à trois points.
Des revers avant le succès
Surdouée, elle s’est rapidement affirmée comme un grand espoir du sport français en enchaînant les titres chez les juniors, certains lui prédisant alors un destin à la Félicia Ballanger, la grande dame du sprint français, triple championne olympique.
Cette pression, elle a eu du mal à l’encaisser, enchaînant les revers après une prometteuse troisième place aux Mondiaux 2019, souvent par manque de confiance en elle. « Je prends des claques mais un jour j’aurai un déclic », disait-elle l’an dernier après deux contre-performances successives aux Jeux de Tokyo (9e de la vitesse individuelle et 13e du keirin) et aux Championnats du monde à Roubaix (9e du keirin).
Le déclic est venu vendredi, sur le vélodrome où elle rêve de gagner l’or olympique dans moins de deux ans et où elle a su se faire violence pour croire davantage en elle. Et jouer les yeux dans les yeux avec les championnes qu’elle admire, comme elle l’a montré en défiant ses adversaires du regard pendant de longues secondes.
« Depuis son arrivée en janvier, Grégory Baugé me répète qu’à la base je fais ça pour prendre du plaisir et j’essaie d’appliquer ça », disait-elle avant les Mondiaux, au sujet de l’ancien champion et nouveau entraîneur national.
Médaille d’argent pour Melvin Landereau
Un plaisir qu’elle a partagé vendredi avec le public, nombreux et survolté, du vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines qui a entonnée des « Mathilde, Mathilde » passionnés. Il avait été échauffé par la belle médaille d’argent décrochée plus tôt dans la soirée de Melvin Landereau, qui était alors la deuxième breloque pour la France dans ces Mondiaux après le bronze déroché la veille par l’équipe féminine de poursuite.
Le champion d’Europe du kilomètre en août à Munich n’a certes rien pu faire face au surpuissant Néerlandais Jeffrey Hoogland qui a conservé son titre avec une marge supérieure à 1 sec 4/10. Mais il s’est ouvert lui aussi, à 24 ans, l’appétit en vue des JO-2024.
« C’est une belle performance, a-t-il commenté. Dès le départ je savais que ça allait être très difficile d’aller le chercher. L’objectif c’est de combler ce ’gap’ avec lui d’ici les Jeux. On va retourner au travail pour tenter de le rejoindre sur cette planète. »
Une planète où habite aussi l’Italien Filippo Ganna qui a remporté un cinquième sacre mondial sur la poursuite individuelle, nouveau record du monde à la clé. Le meilleur rouleur de la planète est pourtant arrivé fatigué sur ces Mondiaux après avoir battu samedi dernier un autre record, celui, mythique, de l’heure en parcourant 56,792 kilomètres sur la piste de Granges, en Suisse.
Mais il a su trouver les ressources pour battre son compatriote Jonathan Milan en finale et enrichir sa vitrine à trophées qui compte aussi deux titres mondiaux dans le contre-la-montre sur route.