Ce sont des bénévoles, des femmes surtout, longtemps dans l’obscurité, qui se retrouvent dans la lumière. Dans les partis de gauche qui s’en sont dotés, les cellules de lutte contre les violences sexistes et sexuelles se retrouvent au cœur des polémiques : accusées de court-circuiter la justice, d’alimenter le « tribunal médiatique » et l’arbitraire.
Julien Bayou, mis en cause par une ancienne compagne, critique celle d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) ; Jean-Luc Mélenchon, depuis l’affaire Taha Bouhafs, ne cache pas son inquiétude quant à une instance qu’il ne contrôle pas, des accusations dont il ne sait rien. Nombreux sont les chefs de partis à remettre en cause ces instances qu’ils ont eux-mêmes avalisées. Jusque-là, ils s’y étaient beaucoup moins intéressés que les féministes de leurs propres mouvements. Portées par elles, les cellules ont permis, après le mouvement #metoo, d’accueillir la parole. Maintenant que l’heure des sanctions a sonné, a fortiori pour des responsables de premier plan, tout se complique.
Libération des « oreilles »
Hélène Bidard, élue communiste parisienne, a animé pendant deux ans le dispositif « Stop violences » du Parti communiste français (PCF). Elle se souvient d’une époque pas si lointaine. Après l’affaire Baupin, qui a éclaté en 2016, quand des camarades lui parlaient encore de « drague lourde ». Quand la libération des « oreilles » n’avait pas encore eu lieu. En conseil national, elle avait pris la parole : « Ces affaires de violences sexistes et sexuelles arrivent dans tous les partis, tous les milieux, et forcément aussi chez nous. » Elle avait été huée. Aujourd’hui, la réponse a changé. Un élu parisien lui a confirmé que, sur les questions d’égalité, « on ne peut plus [lui] dire non en face ». Toute l’hypocrisie du milieu politique face aux revendications féministes résumée en une phrase.
Longtemps, il était facile de cantonner les violences à la sphère privée. Comme l’a rappelé l’ancienne ministre Aurélie Filippetti sur France 5, le 22 septembre, pour les dirigeants de gauche, « ce n’était pas grave, ils considéraient ça comme des choses privées. (…) Ce n’est pas de la grande politique ». Ce manque d’intérêt a laissé des traces. Aujourd’hui encore, les hommes politiques semblent mal à l’aise. « Les divorces, ça n’est pas toujours très simple », a lâché Olivier Faure, interrogé sur Franceinfo dans le sillage de l’affaire Bayou ; le député La France insoumise (LFI) Manuel Bompard, de son côté, a suscité un tollé après cette phrase : « Une gifle n’est jamais acceptable, mais une gifle n’est pas égale à un homme qui bat sa femme tous les jours. »
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