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Le Parlement adopte le projet de loi de finances rectificative, dans lequel la droite a réussi à laisser sa marque

Le Parlement adopte le projet de loi de finances rectificative, dans lequel la droite a réussi à laisser sa marque


Lors des discussions au Sénat sur le projet de loi de finances rectificative, au Sénat, lundi 1er août 2022.

Avant les vacances parlementaires, la valise s’est avérée difficile à boucler, mais c’est chose faite. Tricoté, détricoté, riche en invectives comme en suspensions de séances au petit matin, le projet de loi de finances rectificative (PLFR) 2022 a été définitivement adopté par les parlementaires, jeudi 4 août. Les députés se sont prononcés par 292 voix pour et 120 contre, et les élus du Palais du Luxembourg par 233 voix pour et 97 voix contre. Pour faire valider le second volet de son paquet législatif visant à défendre le pouvoir d’achat – après le premier adopté mercredi –, le camp présidentiel a pu compter sur Les Républicains (LR), qui ont voté en faveur du texte, tandis que la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) a voté contre et que le Rassemblement national s’est abstenu.

Comme un baroud d’honneur, le groupe socialiste à l’Assemblée avait déposé une motion de rejet avant le vote, elle-même rejetée. Pour Mickaël Bouloux (Parti socialiste, Ille-et-Vilaine), qui l’a défendue, le gouvernement, notamment en refusant d’augmenter le smic, « ne propose que des miettes ». « C’est un texte de régression », a renchéri Marianne Maximi (La France insoumise, LFI, Puy-de-Dôme), citant « la monétisation des RTT qui enregistre en catimini la fin des 35 heures ».

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Cette mesure vient du Sénat, où la droite est majoritaire, et n’est que l’une des illustrations du poids qu’elle a su exercer sur le texte, notamment pour encourager le travail selon sa philosophie. Les Républicains réclamaient de pérenniser la possibilité, pour un salarié, de se faire racheter des RTT par son employeur en échange de jours de travail supplémentaires ; le gouvernement n’a pas dit oui, mais il a accepté tout de même de reporter la date butoir pour ce dispositif, de la fin 2023 à la fin 2025.

Carte Vitale biométrique

LR a obtenu, mercredi soir lors de la commission mixte paritaire où députés et sénateurs ont harmonisé leurs versions du texte, que l’augmentation du plafond de défiscalisation des heures supplémentaires – porté de 5 000 à 7 500 euros – ne soit pas limitée dans le temps. En revanche, la droite n’a pas réussi à priver les bénéficiaires de minima sociaux de la prime exceptionnelle de rentrée, pour la réserver aux travailleurs modestes touchant la prime d’activité. Finalement, ces deux publics bénéficieront du chèque, même si son montant pourrait s’en trouver diminué.

A l’Assemblée, la droite s’était déjà illustrée dans la lutte contre la hausse des prix du carburant. LR refusait le plan du gouvernement, consistant à remplacer la ristourne universelle de 18 centimes par litre au profit d’une aide ciblée sur les gros rouleurs et les ménages modestes, et préférait le maintien d’une remise indiscriminée. Elle a levé son barrage quand le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, s’est engagé à reporter son projet, et à augmenter la remise de 18 à 30 centimes en septembre et octobre, avant de la redescendre à 10 centimes en novembre et décembre.

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Conformément à la promesse formulée par Emmanuel Macron dès sa campagne présidentielle, la redevance audiovisuelle sera supprimée. Les députés ont proposé qu’une fraction de la TVA serve à la remplacer, à hauteur de 3,7 milliards d’euros. Les sénateurs ont obtenu que ce fléchage ne soit acquis que jusqu’à la fin 2024, soit, selon un communiqué de presse du Palais du Luxembourg, « le temps nécessaire à la mise en œuvre d’une véritable réforme du secteur ».

Autre exemple de l’assurance de la droite, le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, s’est senti assez fort pour assurer, le 3 août sur RTL, que son camp ne voterait pas le PLFR si celui-ci ne prévoyait pas la mise en œuvre d’une carte Vitale biométrique pour lutter contre la fraude aux prestations de santé. Il a été entendu, et la mesure budgétée pour 20 millions d’euros.

« La seule opposition utile »

La gauche, elle, n’a pas été servie. Ses élus – ainsi que l’extrême droite – demandaient à cor et à cri une taxe sur les superprofits des grands groupes tricolores, en se fondant notamment sur le bénéfice net de TotalEnergies au deuxième trimestre – 5,7 milliards de dollars. Rien de tel n’est prévu dans le PLFR, M. Le Maire ayant dit plusieurs fois tout le mal qu’il pense du « réflexe pavlovien » de la gauche consistant selon lui à multiplier les impôts. Jeudi, Eric Coquerel (LFI), le président de la commission des finances, a jugé au contraire que « nous avons trop besoin de ces recettes, ne serait-ce que pour décarboner l’économie. Ne pas taxer [les superprofits] est moralement, politiquement, économiquement, financièrement et écologiquement intenable ».

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Parmi les autres mesures saillantes du PLFR – qui engage 44 milliards d’euros de dépenses, dont 9,7 milliards pour que l’Etat rachète les 16 % de parts d’EDF qui lui manquent –, est actée la prolongation jusqu’à la fin de l’année du « bouclier tarifaire », c’est-à-dire le plafonnement des prix de l’électricité et du gaz.

Les parlementaires ont aussi obtenu des aides pour les collectivités locales, en arguant de la revalorisation du revenu de solidarité active (RSA) versé par les départements, de l’inflation, et de la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires. Les départements seront soutenus à hauteur de 120 millions d’euros, les communes de 430 millions et les régions de 18 millions, a précisé jeudi à l’Assemblée Gabriel Attal, le ministre délégué aux comptes publics.

Ce paquet législatif voté, il n’en demeure pas moins que les « compromis » vantés par la majorité et ses alliés pourraient tanguer dès l’automne, quand le Parlement débattra d’un nouveau projet de loi de finances pour 2023. La commission des finances de l’Assemblée compte bien nourrir les discussions avec sa « mission flash » sur la taxation des superprofits, avec un rapport attendu en octobre.

En attendant, la droite parlementaire savoure sa fonction de charnière de la majorité présidentielle. « Les députés Les Républicains ont su faire adopter un grand nombre de mesures importantes et ont joué un rôle décisif au service du pouvoir d’achat des Français », et représentent « la seule opposition utile », a vanté la députée Véronique Louwagie (LR, Orne), jeudi à la tribune de l’Hémicycle.

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