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« Un “Buy European Act” est nécessaire pour dynamiser le “made in Europe” et relocaliser notre industrie »

« Un “Buy European Act” est nécessaire pour dynamiser le “made in Europe” et relocaliser notre industrie »



La politique industrielle de l’Union européenne fait cruellement défaut. Notre dépendance à l’égard des biens et des services produits dans des dictatures menace nos conditions de vie et nos démocraties. Pourtant, le plan présenté par la Commission européenne le 16 mars ne nous sortira pas de l’ornière.

L’Europe s’est construite autour du marché unique et des consommateurs, abandonnant les producteurs à une concurrence acharnée au sein et en dehors de l’Union. Cette approche par les règles pour le marché intérieur et le libre-échange pour le marché mondial a failli. Le choix de la mondialisation néolibérale n’a pas seulement désindustrialisé l’Europe en acceptant trop souvent le dumping social, environnemental et fiscal d’une concurrence internationale déloyale. Il a abandonné les classes populaires ici pour les exploiter là-bas. Cette décision a explosé les limites de la planète et généré une formidable concentration des richesses. Loin de favoriser l’expansion de la démocratie, il attise désormais les angoisses individuelles et collectives, nourrit les replis identitaires et favorise les régimes autoritaires.

Surtout, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) vient de le rappeler : face au changement climatique, si on n’agit pas maintenant et massivement, la survie même de l’humanité est menacée. L’adoption de l’Inflation Reduction Act (IRA) par l’administration Biden bouscule un peu plus l’Europe. Son objectif est double : décarboner l’économie américaine et attirer aux États-Unis les entreprises de la transition énergétique. Et ses moyens colossaux : 370 milliards de dollars de réductions d’impôts (jusqu’à 7 500 euros pour l’achat d’un véhicule électrique) et d’aides publiques pour acheter « américain ».

Ce dispositif n’est pas nouveau. Depuis la Grande Dépression des années 1930, les États-Unis sont dotés d’un Buy American Act, faisant des marchés publics un outil stratégique. Les conséquences de l’IRA ont été immédiates. Tesla, Audi et Volkswagen ont réduit leurs investissements en Europe pour les accélérer outre-Atlantique. Selon l’institut Transport & Environment, deux tiers des projets de gigafactories européennes de batteries sont menacés, dont celui de Verkor à Dunkerque (Nord).

Alors que l’Union européenne doit faire face à l’épidémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et le chaos climatique, il est temps de se demander si l’industrie européenne va disparaître à cause du dogmatisme de nos dirigeants. Il est désormais primordial de revoir notre politique industrielle pour sortir de cette impasse et protéger notre économie, notre environnement et notre démocratie. L’Europe doit se doter d’une stratégie commerciale plus ambitieuse et cohérente, d’un mécanisme de défense commerciale plus efficace, de normes de production plus strictes et d’une meilleure coordination de la recherche et de l’innovation entre les États membres.

En définitive, il est temps de prendre conscience que notre industrie est le socle de notre économie, de notre indépendance, de nos protections sociales et de notre démocratie. Il est temps que nos dirigeants se mettent à l’écoute du peuple et adoptent une politique industrielle fondée sur la coopération, la solidarité et la durabilité. Nous ne pouvons plus nous permettre de continuer à ignorer les enjeux qui nous concernent tous.

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