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Tucker Carlson, présentateur vedette de Fox News, écarté brusquement après six ans de radicalisation du discours politique américain

Tucker Carlson, présentateur vedette de Fox News, écarté brusquement après six ans de radicalisation du discours politique américain



Le 24 avril dernier, la chaîne conservatrice Fox News a annoncé qu’elle se séparait de son présentateur vedette, Tucker Carlson. Cette décision intervient une semaine seulement après que la chaîne a accepté de verser une somme de 787,5 millions de dollars (713 millions d’euros) à Dominion Voting Systems, le fabricant de machines de vote électroniques, afin d’éviter un procès en diffamation. Dans le cadre de cette procédure, de nombreux messages privés de Tucker Carlson avaient été révélés, dont certains critiquaient rudement la direction de la chaîne et son propriétaire, Rupert Murdoch.

Le départ de Tucker Carlson, à près de dix-huit mois de l’élection présidentielle américaine, constitue un fait majeur, aussi bien médiatique que politique. Son émission quotidienne était la plus regardée sur les chaînes d’information, avec en moyenne 3,2 millions de téléspectateurs. Mais ce chiffre ne dit rien des vidéos virales sur les réseaux sociaux, ni des extraits diffusés sur d’innombrables sites. Tucker Carlson est l’un des idéologues les plus influents de la droite américaine. Pour les élus républicains, passer sur son antenne constitue une forme d’adoubement.

En avril 2017, Tucker Carlson avait pris la succession de Bill O’Reilly en prime time, à 20 heures. Ce dernier, vétéran de l’antenne et voix populiste influente, avait dû quitter brutalement la chaîne, en raison de multiples allégations de harcèlement sexuel. Une enquête interne et la désertion des annonceurs avaient poussé la direction à prendre une décision radicale, en affichant la volonté d’ouvrir une nouvelle ère.

Tucker Carlson, lui, venait lui-même du bord opposé. Il avait émergé sur la chaîne d’information CNN puis sur MSNBC, où il avait animé une émission politique entre 2005 et 2008. Sur Fox News, il devait trouver une façon de se démarquer. L’autre vedette du soir, Sean Hannity, murmurait à l’oreille de Donald Trump, alors à la Maison Blanche, et chantait ses louanges sans aucune retenue. Tucker Carlson, lui, choisit sa voie : le trumpisme sans Trump. Le présentateur eut l’intuition du potentiel énorme représenté par cette base MAGA (« Make America Great Again »), agrégat d’Américains aux profils variés, le plus souvent non diplômés et se sentant oubliés, avec Dieu à la bouche et des armes à la main.

Selon les informations du New York Times, cette décision de se séparer de Tucker Carlson a été prise aux plus hautes sphères de la chaîne, pour répondre à des pressions considérables venant des annonceurs et des partenaires commerciaux de Fox News. Par conséquent, Tucker Carlson n’était plus le bienvenu. Pourtant, jusqu’à la dernière minute, il avait espéré pouvoir rester. Dans une déclaration faite à Politico avant l’annonce officielle de son départ, Tucker Carlson avait démenti toute idée de quitter Fox News : « Nous serons de retour lundi », avait-il déclaré. Le communiqué de la chaîne disant que son départ était le résultat d’un « commun accord » a l’apparence d’une amputation. La dernière image du présentateur sur Fox News sera donc une séquence où il mange de la pizza à l’ananas et à la saucisse avec un livreur qui avait permis quelques jours plus tôt l’interpellation d’un suspect par la police, dans une petite ville de Pennsylvanie.

Fox News reste une entreprise médiatique gigantesque et dominante aux États-Unis, mais elle n’a pas réussi à s’accrocher aux audiences jeunes que toutes les chaînes cherchent désormais à attirer. Tucker Carlson n’était pas responsable de cet enjeu mais était un symbole de l’hégémonie de la chaîne auprès des républicains âgés. Il était devenu un personnage incontournable du monde de la politique, publiant des opinions tranchées et inspirant des débats dans de nombreux cercles. Reste maintenant à savoir où il atterrira, quel message il enverra et quel impact aura son départ sur les prochaines élections présidentielles américaines en 2024.

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