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La manifestation « contre la vie chère et l’inaction climatique » s’est déroulée dimanche à Paris, entre les places de la Nation et de la Bastille. Les organisateurs, la gauche unie dans la Nupes, revendiquent quelque 140 000 personnes, tandis que la police évoque 30 000 participants. Avant que le cortège ne s’élance, plusieurs personnes ont expliqué à France 24 les raisons de leur présence sur place.
La place de la Nation, à Paris, a comme un air de début d’automne social, dimanche 16 octobre en milieu de journée. Des milliers de personnes sont là, à l’appel de la gauche unie dans la Nupes – La France insoumise en tête – pour manifester « contre la vie chère et l’inaction climatique ». Une idée qu’avait lancée Jean-Luc Mélenchon début juillet, en estimant que la gauche devait impulser la contestation sociale contre le gouvernement.
« C’est la rentrée sociale, il faut mettre le coup d’accélérateur », estime Victor, 29 ans, venu de Marseille pour l’occasion. Les drapeaux de la Nupes sont en nombre au point de départ de la manifestation. Au pied du Triomphe de la République, la statue en bronze au centre du jardin de Marianne, des dizaines de personnes s’échauffent la voix à renfort de slogans sociaux : « Et la retraite, et la Sécu, on s’est battu pour les gagner, on se battra pour les garder », « Même si Macron ne le veut pas, nous on est là »…
Près de là, Cathy, 70 ans, est assise sur un banc avec son mari. Tous deux sont venus en bus d’un petit village du département de la Vienne pour « manifester leur désaccord » contre la politique actuelle. « On veut que le gouvernement comprenne ce que veut le peuple », explique la retraitée de l’enseignement supérieur, qui a vu ces derniers mois « le prix du chariot augmenter » quand elle a fait ses courses.
S’ajoute à cela l’augmentation du prix de l’essence, car il est difficile de vivre sans voiture près de chez elle. « On n’a plus de services publics de proximité, plus de transports. Pour le moindre acte médical, on doit faire 40 kilomètres », explique-t-elle. Et d’ajouter : « On sent qu’il faut faire un effort financier supplémentaire, même si on n’est pas les plus à plaindre quand on est retraité ».
« On ne demande rien d’autre que de pouvoir manger à la fin du mois »
Au pied de la statue, plusieurs dizaines de personnes entonnent maintenant « L’Internationale », chant révolutionnaire écrit pendant la répression de la Commune de Paris, en 1871. La place de la Nation se garnit progressivement de manifestants et de drapeaux politiques.
Les « street medic » – qui soignent les blessés pendant les manifestations – sont aussi là. Quelques Gilets jaunes sont aussi dans le cortège. Parmi eux, Céline, 39 ans, militante de la première heure – depuis novembre 2018. Elle est venue des Yvelines parce qu’il « n’est plus possible de se laisser faire comme ça par le gouvernement », dit-elle. « L’autre jour, j’ai vu une station-essence qui faisait le litre de gazole à 2,99 euros, vous imaginez ? »
Cette ancienne auxiliaire puéricultrice rappelle que le mouvement qu’elle a rejoint dès le départ « défend une noble cause ». « On ne demande rien d’autre que de pouvoir manger à la fin du mois », explique-t-elle. Comme Cathy, elle a vu le prix moyen de son caddie augmenter : « Je payais 100 euros il y a trois ans, maintenant ça me coûte 180 euros pour les mêmes courses ». Et cette mère de deux enfants interroge : « J’ai travaillé pendant 18 ans à l’hôpital et je gagnais à la fin 1 800 euros net. Une fois le loyer, le téléphone, l’assurance et les autres charges payées, comment vit-on ? Et comment fait-on pour payer des activités sportives aux enfants ? »
La question du coût de la vie est omniprésente dans les paroles des personnes rencontrées sur place, mais aussi sur les pancartes : « Que nos salaires soient indexés sur les superprofits des grands patrons », « Leur yachts s’échoueront sur nos grèves », « Canicule sociale : le peuple a soif de justice »…
« La survie de nos enfants et de nos petits-enfants »
D’autres pancartes font écho à l’autre mot d’ordre de la manifestation : l’inaction climatique. Sur cet affichage, un homme en costume troué raconte à trois enfants autour d’un feu de bois : « Oui, la planète a été détruite. Mais pendant un bon moment, on a créé énormément de valeur pour les actionnaires ». Sur un autre, on peut lire : « Fin du monde, fin du mois, même combat ».
C’est ce qui a conduit Jean-Luc, 73 ans, à venir du département de la Haute-Vienne à Paris dimanche. « Le pouvoir d’achat, ce n’est pas ma priorité, la mienne c’est la survie de nos enfants et de nos petits-enfants », explique ce retraité du secteur énergétique et de l’agriculture. « L’inaction climatique est la conséquence de l’irresponsabilité des adultes. Maintenant, il faut rectifier certains paramètres pour que la vie soit encore possible sur cette planète, il y a urgence. »
Victor ne dit pas autre chose. « Plutôt que de parler d’inaction climatique, on devrait plutôt dire ‘actions contre le climat’. Les dirigeants sont en train de détruire la planète, on va droit dans le mur. » Pour changer les choses, il voit une première solution « simple, basique » : « Taxer les riches, ce serait déjà pas mal ».
Cathy voudrait, quant à elle, que « soient taxés les superprofits« , un discours souvent entendu dimanche. Céline, qui se dit « en colère depuis des années », souhaite pour sa part que « les consciences s’éveillent » : « Ma seule force, c’est d’aller gueuler dans la rue. Je suis là pour les autres qui se croient à l’abri financièrement pour le moment. Mais on fera quoi demain, quand la vie sera trop chère ? »