Les magistrats français chargés d’enquêter sur l’attribution controversée du Mondial 2022 au Qatar n’ont pas jugé utile, le 13 octobre 2021, de questionner Gianni Infantino, entendu comme témoin, sur ses rapports étroits avec l’émirat. S’il reste soumis à l’impôt en Suisse, selon la FIFA, le dirigeant vit principalement à Doha depuis l’automne 2021, où il loue une maison pour sa famille. Soit à plusieurs milliers de kilomètres de Zurich, où la FIFA a installé son siège en 1932.
C’est la première fois qu’un président de la FIFA réside dans le pays hôte du Mondial plus d’un an avant sa tenue. En 2018, M. Infantino était arrivé en Russie quelques jours avant l’ouverture du tournoi.
Depuis la réforme des statuts de la FIFA, en 2016, le président de l’instance est censé n’avoir qu’un rôle représentatif et stratégique, et nullement opérationnel. Alors que l’émirat a annoncé la livraison des huit stades prévus avec près d’un an d’avance sur le calendrier, pourquoi M. Infantino a-t-il décidé de s’installer à Doha ? Et quelles y sont ses activités ? Qui paie la location de sa maison ? Des membres de sa famille travaillent-ils pour le comité d’organisation Qatar 2022 ? La FIFA ne répond pas à ces questions.
Sepp Blatter : « C’est une erreur. Il n’a rien à y faire »
« L’installation de Gianni au Qatar s’explique-t-elle par son intérêt personnel ? Son souci d’assumer le choix du Qatar, de montrer son soutien ? Il se positionne par rapport à cette Coupe du monde, première source de revenus de la FIFA, et il serait dans l’erreur s’il ne la soutenait pas. Il est dans son rôle de président », estime Jérôme Valcke, qui était secrétaire de la FIFA quand Sepp Blatter présidait l’instance.
Ce dernier, qui regrette la victoire du Qatar en 2010, a un autre avis. « Infantino n’a pas à vivre dans le pays hôte du Mondial. C’est une erreur. Il n’a rien à y faire. Il perd de sa neutralité et de sa superbe de président s’il y a un problème sur place et qu’il doit trancher », souligne M. Blatter, 86 ans, pour qui son successeur est devenu « un allié bienvenu » de l’émirat.
Depuis son intronisation en 2016, M. Infantino est dans une position d’équilibriste, couvant l’émirat gazier malgré sa proximité avec son voisin et rival, l’Arabie saoudite de Mohammed Ben Salman.
La décision de la FIFA, en 2020, de retirer sa plainte déposée quatre ans plus tôt en Suisse pour « corruption privée active » contre le Qatari Nasser Al-Khelaïfi, patron du Paris-Saint-Germain et de la chaîne BeIN Sports, a notamment surpris le parquet helvétique. A l’époque, cet accord à l’amiable, dont les dessous restent secrets, entre M. Al-Khelaïfi – poursuivi par le parquet suisse dans l’affaire de l’octroi des droits des Mondiaux 2026 et 2030 à la chaîne BeIn – et la FIFA avait fait l’objet d’une compensation financière.
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