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Beaucoup se souviennent d’elle comme de « la première femme à avoir conduit une voiture au Nigeria ». Mais Funmilayo Ransome-Kuti était « bien plus que cela », rappelle Akinlabi Shokunbi, le directeur du Kuti Heritage Museum, situé à Abeokuta, la ville d’origine de cette militante anticoloniale, engagée pour les droits des femmes.
Le jour de sa mort, en avril 1978, un journal choisit de titrer « La mère de Fela est morte », provoquant la colère du musicien, selon sa fille Yeni Kuti, qui dirige aujourd’hui avec son frère Femi le New Afrika Shrine, la salle de concert mythique de la famille, à Lagos. « Fela était fou de rage face à cette une qui semblait minimiser l’existence de sa mère et son combat. Un autre journal a titré “La voix des femmes est morte”. J’avais 16 ans à l’époque, j’en ai 61 aujourd’hui, mais ces mots sont restés gravés dans ma mémoire », assure Yeni Kuti, qui avoue pourtant n’avoir « jamais été une grande fan » de cette grand-mère « extrêmement stricte » lorsqu’elle était enfant.
Née en 1900 dans une famille de notables du sud-ouest du Nigeria, Funmilayo Ransome-Kuti est l’une des premières filles à être scolarisée au sein de l’Abeokuta Grammar School, en 1914, avant de poursuivre une partie de ses études en Angleterre. Avant même son retour au Nigeria, en 1922, la jeune femme exprime déjà la volonté de couper avec toute forme d’acculturation européenne. Elle abandonne ainsi son nom de naissance chrétien – Frances Abigail – pour conserver son seul nom yoruba, Oluwafunmilayo. Dans les années 1970, sous l’influence de son fils Fela, elle modifiera également son nom de famille en « Anikulapo-Kuti ». Elle a en outre rapidement délaissé les vêtements occidentaux au profit de tenues yoruba traditionnelles qu’elle porte en toutes circonstances, y compris lors de rencontres officielles.
« Novatrice » et « inclusive »
Car la vie de Funmilayo Ransome-Kuti va bien vite prendre une tournure très politique, au niveau local, mais aussi national et international. Dans sa ville, elle prend la tête de l’Abeokuta Women’s Union (AWU), une association fondée en 1946 et qui lutte notamment contre les impôts coloniaux qui pèsent sur les petits commerçants, en majorité des femmes. Lourdement taxées et régulièrement humiliées, celles-ci sont pourtant privées de représentation politique, puisqu’elles ont été exclues du conseil municipal de la ville par l’administration coloniale.
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