in

Des humains ou des chatbots ? Entreprises et services publics cherchent le bon dosage pour les échanges avec leurs clients

Des humains ou des chatbots ? Entreprises et services publics cherchent le bon dosage pour les échanges avec leurs clients



Eric (nom fictif), un directeur de centre communal d’action sociale de 54 ans, se sent régulièrement comme un pompier en raison de la fréquence à laquelle on le sollicite pour régler les problèmes administratifs de « M. et Mme Tout-le-Monde ». Les fermetures de guichets dans les services publics ont accru l’utilisation de sa fonction. Toutefois, il est souvent incapable de fournir une solution adéquate puisqu’il ne peut pas joindre les interlocuteurs appropriés par téléphone. Comme il le souligne, « autrefois, les administrations avaient du personnel pour répondre au téléphone et traiter les demandes ». Aujourd’hui, ce sont des « plates-formes téléphoniques qui, en plus d’être difficilement joignables, donnent souvent des réponses stéréotypées, pas forcément adaptées aux situations individuelles ».

Le lancement de la nouvelle version du « chatbot » (robot conversationnel) GPT-4 par la start-up américaine Open AI en mars 2023 pose la question de savoir si nous devrons bientôt effectuer toutes nos démarches administratives par l’intermédiaire de ces robots. Le Conseil d’Etat plaide pour un déploiement volontariste de l’intelligence artificielle dans les services publics afin d’améliorer l’interaction avec les citoyens. Cependant, la Défenseure des droits, Claire Hédon, craint une « déshumanisation ». Son rapport annuel publié le 17 avril souligne l’absence de réponse, les délais déraisonnables, la difficulté à joindre l’agent responsable du dossier, l’impossibilité de prendre rendez-vous au guichet, et, quand on y arrive, de faire aboutir une démarche, sur les 89 659 sollicitations reçues en 2022, 92% concernaient les relations avec les services de l’Etat.

Le taux de dématérialisation est en constante progression depuis les dernières années, impulsée notamment par le grand plan d’investissement 2018-2022. Selon l’Observatoire de la qualité des démarches en ligne, 87% des 250 formalités administratives les plus courantes pouvaient se faire sur internet en janvier 2022, soit une augmentation de 20 points par rapport à mai 2019. Cette construction de l’Etat numérique présente des avantages, mais seulement pour une partie de la population, notamment pour les 13 millions de Français qui ont des difficultés avec les outils informatiques. Claire Hédon souligne que la dématérialisation est une chance si elle permet d’améliorer le service rendu aux usagers, mais le problème aujourd’hui, c’est qu’elle s’accompagne d’une fermeture de guichets de proximité et donc de la suppression de tout contact humain.

Cette dématérialisation accrue de l’administration publique s’accompagne souvent d’une réponse automatisée par e-mail ou par « chatbot ». Les robots conversationnels ont été présentés comme un moyen d’aider les gens avec leurs démarches administratives, mais ils peuvent être frustrants et ne répondent pas toujours aux questions posées. Les personnes qui cherchent de l’aide se sentent souvent exclues, car de nombreux robots conversationnels ne sont pas équipés pour répondre aux besoins individuels. Les défis d’effectuer des démarches en ligne sont particulièrement aigus pour les personnes âgées, les personnes handicapées ou celles qui ont peu d’expérience avec la technologie. Pour toutes ces raisons, une déshumanisation des services publics est une préoccupation majeure pour la Défenseure des droits et de nombreux citoyens français.

Pour résoudre ces problèmes, les services publics doivent être repensés. Les fonctionnaires devraient être formés pour utiliser les technologies numériques et pour offrir un service de haute qualité aux citoyens, tout en préservant une présence humaine en face-à-face pour les cas les plus complexes. Les guichets doivent rester ouverts pour les personnes qui ont besoin d’un contact physique et les plates-formes téléphoniques doivent être équipées de personnel qualifié pour répondre aux questions des gens. De plus, les robots conversationnels doivent être améliorés pour fournir des réponses intelligentes et adaptées à chaque demande individuelle. Seul un équilibre de ces composantes permettra de garantir que la dématérialisation ne conduise pas à une déshumanisation des services publics.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

la Cour suprême des Etats-Unis opte pour le statu quo

La Cour suprême américaine décide de maintenir la situation actuelle

le bilan est désormais de douze blessés, dont une femme au pronostic vital engagé

Le compte rendu est maintenant de douze personnes blessées, y compris une femme dont la vie est en danger.