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31,4 milliards d’euros, soit deux fois plus que la somme espérée initialement. Les résultats de la collecte de fonds organisée lundi 5 et mardi 6 décembre à Paris auront dépassé les attentes du Niger. Des investisseurs privés et les partenaires techniques et financiers de ce pays sahélien – autrement dit les institutions financières internationales, les agences des Nations unies, l’Union européenne et autres banques de développement – se sont engagés à accompagner le Plan de développement économique et social (PDES) conçu par Niamey pour les années 2022-2026, signe de l’intérêt porté à ce pays fragile, mais relativement stable politiquement et économiquement, dans une région balayée par les coups d’Etat et les violences djihadistes.
Ce plan quinquennal vise à stimuler une croissance économique censée atteindre, sur cette période, un taux annuel moyen de 9,3 % (contre 5,4 % en moyenne entre 2017 et 2020). L’inflation serait contenue à moins de 3 %, de même que le déficit budgétaire global. L’un des objectifs prioritaires est de ramener le taux de pauvreté de 43 % en 2022 à 35 % en 2026. « La mise en œuvre du plan précédent (2017-2021) s’est déroulée dans un environnement sécuritaire et sanitaire difficile, mais il a permis d’enregistrer des progrès », constate Sergio Pimenta, vice-président de la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale) pour l’Afrique. « Il existe une réelle capacité d’investissements prometteurs », ajoute-t-il, notamment dans les télécoms, l’énergie électrique et les infrastructures.
En plus de l’apport de ses partenaires, l’Etat nigérien adjoindra 13,35 milliards d’euros de ressources propres pour financer le PDES. « Cet effort traduit d’abord la responsabilité de l’Etat », souligne Abdou Rabiou, ministre du plan. La mobilisation de cette somme extrêmement conséquente (elle équivaut au PIB de 2021) serait possible « grâce au développement de la production et des exportations de pétrole », explique Hassoumi Massaoudou, ministre des affaires étrangères.
Bond en avant
Le Niger prévoit en effet de pomper de son sous-sol 110 000 barils par jour dès 2023, contre 20 000 actuellement. Ce bond en avant découle de la mise en service prochaine d’un oléoduc courant sur 2 000 km jusqu’au littoral béninois, qui permettra d’écouler cette production supplémentaire que ne peuvent absorber les capacités, limitées, de raffinage nationales. Les revenus tirés du pétrole pourraient représenter « jusqu’à la moitié des recettes fiscales du pays et un quart du PIB », estime le gouvernement. « L’Etat disposera alors d’un espace budgétaire lui permettant de prendre en charge de façon beaucoup plus affirmée le financement du développement et des dépenses sociales », argumente le ministre du plan.
Selon le ministre du plan, « à ce jour, tous les investisseurs étrangers présents au Niger dans le domaine pétrolier sont chinois »
Ce ne serait que le début du processus, au regard du potentiel pétrolier et gazier du Niger, où, selon le président Mohamed Bazoum, les réserves « sont estimées respectivement à plus de 1 200 millions de barils et plus de 17 milliards de mètres cubes ». Le chef de l’Etat a pris soin de rappeler que « plusieurs blocs sont encore disponibles ». « A ce jour, tous les investisseurs étrangers présents au Niger dans ce domaine sont chinois », a précisé Abdou Rabiou, tout en ajoutant : « Nous aimerions voir se manifester l’intérêt des Français. »
C’est d’ailleurs dans le but d’attirer des partenaires privés français que le président nigérien s’est rendu mardi matin au Mouvement des entreprises de France (Medef). Mohamed Bazoum a appelé la trentaine de grands patrons présents au siège de l’organisation à « valoriser les énormes potentialités d’investissement dont regorge le Niger ». Ces opportunités concernent le domaine minier, pétrolier et gazier, les infrastructures économiques (aéroports, routes, énergie, ports secs) et l’agro-industrie, par la transformation et la valorisation industrielle des produits agropastoraux.
« Un pays fréquentable »
Un certain nombre d’entreprises ont, semble-t-il, répondu au-delà des attentes nigériennes. Des déclarations d’intention, préalable à la conclusion d’accords, ont ainsi été signées pour « un montant global de 8,5 milliards d’euros » (contre 6 milliards attendus), se félicitent les autorités nigériennes dans le communiqué publié en clôture de ces deux jours de table ronde pour le financement du PDES.
Pour attirer les entreprises, le Niger met en avant sa situation géostratégique. « Une position avantageuse entre l’Afrique de l’Ouest et le Maghreb, donnant accès à un marché de 550 millions de consommateurs », selon la description du président Bazoum. « Le Niger est un pays fréquentable qui se démarque de ses voisins », souligne un acteur du développement très engagé dans la région.
Car les menaces sont aux portes du pays, bordé notamment par le Tchad, la Libye, le Nigeria, le Mali et le Burkina Faso, qui constituent autant des marchés économiques potentiels que des sources de déstabilisation. « Le nombre d’actions violentes menées au Niger par les groupes armés djihadistes liés à Al-Qaïda ou à l’Etat islamique a baissé cette année, mais il y en a toujours. La situation reste très tendue et peut décourager certains investisseurs, notamment les PME », ajoute notre source.