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Quel avenir pour LIV Golf et le sport?

Quel avenir pour LIV Golf et le sport?


BEDMINSTER, New Jersey | Alors que la nouvelle série LIV Golf joue les trouble-fêtes dans l’écosystème du sport, une question capitale reste toujours sans réponse. Se verra-t-elle reconnue officiellement par l’organisation du classement mondial pour que ses joueurs engrangent les précieux points ? 

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C’est l’épée de Damoclès qui pend sur l’avenir du sport. 

Une pleine reconnaissance modifierait toutes les balises du sport, tandis qu’un refus accentuerait la division entre LIV et les circuits traditionnels tout en causant des torts irréparables.

La réponse viendra de la plume de Peter Dawson, grand manitou du classement mondial. Durant la semaine de l’Omnium britannique, le grand décideur autrefois patron du prestigieux Royal and Ancient (R&A) a confirmé avoir reçu le formulaire d’adhésion de LIV. 

Il est présentement à l’étude. La force du plateau, les formats utilisés, le type de compétition et les parcours sélectionnés, entre autres, figurent parmi les critères scrutés. 

Personne ne peut estimer le délai de réponse. Certains des 22 circuits sous l’égide du classement mondial ont attendu quelques années avant d’obtenir sa reconnaissance. 

Devant les enjeux auxquels fait face le sport, il serait étonnant que M. Dawson retarde sa décision aussi longtemps. Greg Norman, commissaire de LIV Golf, l’a d’ailleurs rencontré en Écosse pour lui présenter son modèle d’affaires. 

Ça gronde autour

Mais au bureau de gouvernance, Dawson est entouré des représentants du Augusta National, du R&A, de l’Association de golf des États-Unis, de la PGA d’Amérique, du commissaire du circuit de la PGA Jay Monahan, du commissaire du DP World Tour Keith Pelley et de la Fédération internationale des circuits professionnels. 

La majorité d’entre eux ont farouchement exprimé leur opposition à la nouvelle ligue en raison de son comportement, sa source de financement, sa structure et son impact sur le sport. Du lot, seul le président du Augusta National, Fred Ridley, n’a pas encore émis ses commentaires puisque la tempête a levé après le dernier Masters, en avril. 

Lors de l’Open à St Andrews, le président du R&A Martin Slumbers a balayé du revers de la main la question d’un éventuel conflit d’intérêts dans le dossier. « Cet enjeu aurait à être décidé par le droit britannique des sociétés », avait-il sèchement répondu.

Le bureau de gouvernance et son comité technique veillent à ce que le système mondial du golf tourne rondement. Selon sa mission, il doit le raffiner et l’adapter à la structure constamment changeante du sport. Il doit aussi écouter les suggestions des joueurs et des circuits qu’il a reconnus. 

Outils de référence 

Confronté au méchant loup qui est entré dans la bergerie cet été, Dawson doit prendre une décision éclairée en respect avec la mission de l’organisation. 

Le classement mondial est utilisé comme outil pour déterminer les plateaux des grands championnats depuis plus de 30 ans. Un bon rendement au classement est la principale porte d’entrée des quatre tournois du Grand Chelem. 

Sans engranger de points puisqu’il évolue sur un circuit non sanctionné, un golfeur dégringole en perdant ses privilèges. Ainsi, selon les critères d’admissibilité, il peut être exclu des omniums américain et britannique, du Championnat de la PGA d’Amérique, du Tournoi des Maîtres et des Championnats mondiaux de golf (WGC). 

Bien qu’ils souhaitent présenter les plateaux les plus relevés du sport, les dirigeants de trois des quatre tournois du Grand Chelem ont affirmé qu’ils réviseraient leurs critères d’admissibilité. Le dernier en lice, Martin Slumbers, du R&A, fut très clair à cet égard. 

Une voie de contournement

En attendant, les joueurs qui ont déserté les circuits traditionnels de la PGA et du DP World Tour et qui souhaitent conserver leur rendement au classement mondial caressent l’intention de participer à des événements du circuit asiatique. 

L’Asian Tour a d’ailleurs reçu un investissement de 300 M$ de LIV qui compte organiser une série d’événements internationaux en sol asiatique. 

Ceux qui pensaient se la couler douce en participant à une poignée de tournois à bourses élevées et assurées pourraient être contraints à revoir leur stratégie en voyageant vers l’Asie. 

Une trêve ? 

Dans le meilleur des mondes, les circuits professionnels devraient s’entendre sur les règles du jeu en apprenant à coexister. Mais les circuits traditionnels qui perdent des vedettes ne semblent pas prêts à ramollir leur ligne dure. 

En ce moment, il est difficile de croire à une trêve.

Soutenu par le Fonds public d’investissement d’Arabie saoudite, Greg Norman a assuré que LIV était là pour rester et qu’en prime, la ligue ne faisait que prendre de la vitesse avec le modèle d’affaires de 2023 dévoilé cette semaine. 

L’avenir dira si ce modèle est viable. 

La formule doit fonctionner 

La série mise beaucoup sur les équipes pour attirer l’attention vers un produit différent 


L’Américain Bubba Watson, en action au Championnat de la PGA de mai dernier, est l’un des plus récents à avoir fait le saut dans la nouvelle série LIV Golf.

Photo d’archives, AFP

L’Américain Bubba Watson, en action au Championnat de la PGA de mai dernier, est l’un des plus récents à avoir fait le saut dans la nouvelle série LIV Golf.

La nouvelle série LIV Golf met le paquet sur son concept d’équipes pour mousser un produit qu’elle vante comme une innovation. 

La compétition par équipes n’est pas nouvelle dans le paysage du golf professionnel. Elle est simplement moins fréquente. Un tournoi annuel du circuit de la PGA, la Classique Zurich, en Nouvelle-Orléans, propose une formule par équipes. 

Mais les plus connues sont évidemment la Coupe Ryder, l’une des plus grandes compétitions sportives au monde, qui oppose les golfeurs américains à ceux de l’Europe. La Coupe des Présidents oppose quant à elle les Américains aux joueurs internationaux. Il s’agit d’événements biennaux. 

Fonctionnement

La direction de LIV Golf estime qu’elle innove puisqu’elle propose une formule par équipes à chacun de ses tournois. Les 48 joueurs sont répartis à travers 12 équipes dirigées par un capitaine qui figure évidemment parmi les têtes d’affiche de la ligue. Les deux meilleurs scores sont retenus à chaque trou.

Au classement par équipes, le top 3 partage une bourse additionnelle de 5 M$, dont 3 M$ sont remis à l’équipe championne. Chacun des joueurs touche 25 % du montant. 

Le huitième et dernier tournoi de la saison, sur le parcours Blue Monster du Trump National à Doral, en Floride, sera réservé entièrement à la formule par équipes. Les 12 formations s’affronteront dans des duels à élimination directe. La bourse s’élèvera à 50 M$, dont la somme de 16 M$ est réservée aux champions. 

Stabilité à venir

Encore en période de rodage, LIV tente de se stabiliser et d’établir ses fondements. On prévoit que les formations seront moins assujetties à des modifications au fil des prochains événements. 

Les dirigeants de la ligue répètent fréquemment qu’ils souhaitent que leur formule ressemble à la Formule 1. Sur le terrain, c’est plutôt ardu à suivre puisque tous les groupes démarrent au même moment.

Pour se distinguer, la ligue tente de peaufiner son projet. Par ailleurs, on retrouve un type de jeu semblable dans les rangs collégiaux américains. 

« Les amateurs comprennent les jeux d’équipe. La formule de LIV vient simplement ajouter une couche. Nous allons tous l’améliorer à travers le temps. Un jour, peut-être que les équipes vont être plus populaires que les joueurs. Il faudra voir comment la formule se développe », a indiqué Paul Casey en marge du tournoi à Bedminster.

D’autres noms à venir

Un peu à l’image des contrats signés, les dirigeants de LIV continuent à gonfler la « balloune ». Ils prétendent qu’il n’y aurait bientôt plus de disponibilité pour rejoindre la série dissidente. 

Le gaucher Bubba Watson, 43 ans et champion du Masters à deux reprises, est la récente prise de la ligue.

De nouvelles embauches devraient être annoncées après la conclusion du calendrier du circuit de la PGA, au début de septembre. 

Le torchon n’a pas fini de brûler dans l’univers du golf. 

Déjà les yeux sur 2023 

Aux dires des dirigeants, la série LIV serait en avance sur son échéancier. C’est pourquoi elle a annoncé, en marge de son troisième tournoi cette semaine, son calendrier 2023. 

Celui-ci comporte 14 tournois qui seront disputés à travers l’Amérique du Nord, l’Amérique latine, l’Europe, l’Asie, l’Australie et le Moyen-Orient. La coquette bourse totale grimpera à 405 M$… 

Pour libérer ses 48 joueurs, ce calendrier n’interférerait pas avec les importants événements de la saison traditionnelle de golf, notamment avec les majeurs et les tournois internationaux.

Franchises

La nouveauté, c’est que LIV lancera ses franchises pour former une réelle ligue de 12 équipes. C’est évidemment pourquoi elle mise sur la formule en équipes pour se distinguer (lire autre texte ci-haut). 

Encore la propriété de LIV, ces équipes seront gérées par les capitaines. Ceux-ci auront à convaincre les golfeurs qu’elles souhaitent embaucher pour renforcer la formation sur le parcours et fonder une solide stratégie marketing pour développer le marché de son logo. 

Par cette stratégie, LIV espère séduire des investisseurs prêts à embarquer dans son modèle d’affaires. Cette tâche ne s’annonce pas de tout repos en raison de la source d’argent principale : le Fonds public d’investissement d’Arabie saoudite. En rejoignant la ligue, plusieurs golfeurs ont perdu des commandites. De grandes entreprises ont rompu leurs liens de longue date, dont RBC avec Dustin Johnson et UPS avec Lee Westwood. 

Encore plus d’argent

LIV cherche aussi à attirer un diffuseur ou un média de streaming. Parmi ses grands dirigeants, la ligue compte plusieurs anciens de grands réseaux, dont FOX. On se souvient toutefois qu’en 2020, celui-ci avait rompu son contrat de 12 ans avec la USGA, qui avait démarré en 2015.

Sans entente, elle poursuivra la diffusion de ses tournois sur son site web et ses réseaux sociaux. 

Sous le feu des critiques depuis son arrivée dans l’univers du golf en raison de sa stratégie ultra-agressive, son format et son absence de programme pour contribuer au développement du sport, LIV continue de dépenser sans compter. 

Elle plonge davantage dans le principe du blanchiment par le sport, car pour continuer à redorer le blason de l’Arabie saoudite, la ligue a investi 300 M$ dans l’Asian Tour et injectera 100 M$ dans une fondation à responsabilité sociale dans le sport.



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