La croissance économique mondiale ralentit, créant une conjoncture de plus en plus incertaine. Les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI), publiées le 11 avril, estiment que la croissance ne devrait pas dépasser 2,8 % en 2023, contre 3,4 % en 2022, soit 0,1 point de pourcentage de moins par rapport aux anticipations de janvier dernier. Les économies avancées sont plus touchées, en particulier la zone euro où la croissance chute de 3,5 % en 2022 à 0,8 % en 2023. Le Royaume-Uni et l’Allemagne sont parmi les seuls pays au monde à connaître une contraction de leur produit intérieur brut (PIB) (respectivement -0,3 % et -0,1 %) en 2023. Même l’économie russe, pourtant sous sanctions, devrait mieux se porter avec une augmentation de son PIB de 0,7 % en 2023.
Le 6 avril, Kristalina Georgieva, directrice générale du FMI, a déclaré que la croissance pour les cinq prochaines années se situerait autour de 3 %, « notre plus faible perspective à moyen terme depuis 1990 ». Cependant, c’est l’inflation qui préoccupe particulièrement le FMI. Malgré une forte remontée des taux d’intérêt dans le monde, celle-ci ralentit plus lentement que prévu et devrait se maintenir à 7 % en 2023, contre 8,4 % en 2022. C’est deux fois plus élevé qu’avant 2021, et bien au-delà des objectifs des pays touchés.
L’inflation ne découle pas seulement de la hausse des prix des produits alimentaires et de l’énergie, qui ont ralenti depuis le pic atteint au moment de l’invasion russe en Ukraine à la mi-2022, ni de la hausse des salaires qui demeurent contenus selon le FMI malgré des tensions importantes sur le marché du travail. L’institution note également que la demande, c’est-à-dire la consommation ou les investissements, reste plus forte que prévu, ce qui pourrait nécessiter un nouveau resserrement de la politique monétaire ou un resserrement plus long que prévu.
Les banques centrales ont désormais une tâche encore plus complexe avec les récentes faillites bancaires aux États-Unis provoquées par une hausse des taux d’intérêt. La hausse des taux de la Réserve fédérale américaine, comprise entre 4,75 % et 5 %, a conduit en mars à la faillite de plusieurs banques régionales américaines, dans la foulée de la Silicon Valley Bank (SVB) début mars, et du rachat précipité de Credit Suisse par UBS.
Les institutions financières doivent donc ralentir l’inflation sans sacrifier la croissance, un équilibre difficile à trouver. Pourtant, elles doivent aussi prendre garde à ne pas alimenter l’instabilité financière. Pierre-Olivier Gourinchas, le chef économiste du FMI, note que le resserrement brutal de la politique monétaire au cours des douze derniers mois commence à avoir des effets collatéraux importants sur le secteur financier, et n’exclut pas la possibilité que « le système financier soit à nouveau mis à l’épreuve ».
En fin de compte, les prévisions économiques mondiales les plus récentes laissent présager des temps difficiles pour les économies avancées, notamment en Europe. Les banques centrales devront jongler entre une pression inflationniste croissante et le maintien de la croissance économique, tout en prenant garde à ne pas provoquer d’instabilité financière, ce qui nécessitera certainement une action concertée à l’échelle mondiale.