Vainqueur en 1978 de la première édition de la Route du rhum, pour 98 secondes devant Michel Malinovsky, après vingt-trois jours de course, Mike Birch s’est éteint, mercredi 26 octobre, à 90 ans, à son domicile de Brec’h, dans le Morbihan.
La disparition du marin canadien, à quelques jours du départ de la douzième édition de cette course qui a construit sa légende, est celle d’un immense pionnier des traversées hauturières. Mike Birch estimait qu’il avait traversé l’Atlantique au moins soixante fois : « J’ai arrêté de compter », disait-il. Mais surtout sans jamais chavirer.
On ne disait pas encore coureur au large mais « navigateur aventurier », rappelle Charlie Capelle. Ce dernier, constructeur et navigateur, prendra le départ de sa septième Route du rhum à bord de l’un des quatre bateaux jumeaux (sister-ships) d’Olympus Photo, le petit trimaran jaune à bord duquel Mike Birch, il y a quarante-quatre ans, démontra la supériorité d’un petit multicoque construit en lamellé-collé de 11 mètres sur un monocoque en contre-plaqué de 21 mètres. Michel Malinovsky aura ce mot historique sur le ponton pour saluer son adversaire : « Seule la victoire est jolie. »
Le succès de Mike Birch en 1978 a ouvert la voie aux multicoques d’aujourd’hui. Dessiné par l’architecte américain Walter Greene, Olympus fut le premier de la série des A’Capella. Olympus a été abandonné en mer par son nouveau propriétaire lors d’un convoyage entre les Etats-Unis et l’Europe, deux ans après la victoire de Mike Birch.
« L’anti-Eric Tabarly »
L’œil bleu, silencieux, Birch pouvait avoir parfois une raideur pastorale ou militaire dans le visage. Il lui arrivait alors de répondre par « maybe » ou « perhaps ». Ou bien ne répondait pas. Ou encore par des phrases minces et coupantes comme un rasoir. Tel était cet homme, au muscle sec et long, remarié à France depuis quarante ans. Le couple partageait sa vie entre le Morbihan et l’embouchure du Saint-Laurent. En Bretagne, il n’était jamais loin des chantiers qui redonnaient vie aux navires-jumeaux nés de la série dessinée par Walter Greene.
« Il était l’équilibre en mer : aller vite sans casser. Je l’appelais maître Jedi », Loïck Peyron, navigateur
« J’avais toujours eu un peu l’impression que Mike sortait de la cave. Il se dépliait et retrouvait alors d’un coup sa forme verticale, raconte Loïck Peyron, avec qui il a disputé, en 1983, Lorient-Les Bermudes-Lorient sur un petit catamaran. Mike pliait, faisait le dos rond quand le temps forcissait. Mike, c’était l’école de la souplesse absolue, en quelque sorte l’anti-Eric Tabarly, qui pensait, lui, que si ça ne tenait pas, c’est que les calculs étaient mal faits. Si une connerie se produisait à bord, Mike ne disait rien, mais dévisageait l’impétrant avec ce regard à la Clint Eastwood dans L’Inspecteur Harry. Il était l’équilibre en mer : aller vite sans casser. Je l’appelais maître Jedi. »
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