L’annonce de sa mort a été à l’image de sa vie. Dans un océan de contenu marketing, le site Internet de Red Bull a publié, samedi 22 octobre, un bref message : « Dietrich Mateschitz est mort aujourd’hui. » Aucun détail n’est fourni sur les circonstances et le lieu du décès du richissime Autrichien connu pour avoir fondé la plus célèbre des boissons énergisantes, roi incontesté du marketing sans avoir jamais ou presque donné d’interview. L’entreprise précise tout juste avoir demandé à ses plus de treize mille employés dans le monde entier « de respecter son souhait d’exprimer leur chagrin dans le silence et la retenue ».
Mort à 78 ans, Mateschitz, plus souvent surnommé affectueusement « Didi » dans son pays, était pourtant à l’origine de l’entreprise autrichienne la plus célèbre à l’international. Depuis son siège, installé sur les bords d’un lac de la région de Salzbourg, celle-ci se vante d’avoir vendu, en 2021, près de 10 milliards de canettes marquées du célèbre logo aux deux taureaux et remplies d’un breuvage au goût chimique prononcé. Tout juste la presse germanophone avait-elle relevé ces derniers temps l’absence du patron à la chevelure blanche et au grand sourire, qui ne portait jamais de cravate aux événements sportifs qu’il sponsorisait, laissant entendre qu’il souffrait « d’une longue maladie ».
Né le 20 mai 1944 dans une petite commune de la vallée de la Mürz, au centre de l’Autriche, « Didi » a étudié le commerce à Vienne avant de mener d’abord une carrière anonyme dans le marketing de plusieurs grands groupes, dont la multinationale Unilever. Selon l’histoire officielle – il n’y en a jamais eu d’autre –, c’est en 1982, à 38 ans, que l’Autrichien eut la révélation qui changera sa vie. Alors en déplacement professionnel à Hongkong pour le compte d’une marque de dentifrice allemande, il tombe sur un article de presse où il est surpris d’apprendre que la plus grande fortune du Japon est le patron d’une entreprise de boissons énergisantes inconnue en Occident.
Tests consommateurs désastreux
Fasciné, il prolonge ses recherches et découvre en Thaïlande le Krating Daeng (« taureau rouge » en thaï), une boisson énergisante à base de caféine produite par une entreprise familiale locale. En 1984, il réussit à convaincre la famille, les Yoovidhya, de l’autoriser à exporter leur formule en dehors de l’Asie. Il obtient une licence exclusive et fonde avec eux, en 1986, en Autriche, Red Bull Trading GmbH. Aujourd’hui encore, les héritiers Yoovidhya détiennent 51 % des parts du groupe, même si c’est Mateschitz qui prenait toutes les décisions opérationnelles. En 1987, la première canette est lancée sur le marché, avec une recette rendue plus pétillante par rapport à l’originale thaïlandaise.
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