Rishi Sunak, ex-ministre des Finances britannique, est le premier à avoir dépassé vendredi soir le seuil des 100 parrainages requis afin de concourir pour prendre la tête du parti conservateur après la démission de la Première ministre Liz Truss. « Fier d’être le centième député tory à soutenir #Ready4Rishi », a tweeté le député Tobias Ellwood, un de ses soutiens. Au lendemain de la démission de la Première ministre, après seulement 44 jours au pouvoir, trois noms ont émergé pour cette campagne éclair au sein du parti de droite : l’actuelle ministre des Relations avec le Parlement Penny Mordaunt, Rishi Sunak, qui avait perdu début septembre face à Liz Truss, et l’ex-Premier ministre Boris Johnson.
Selon le site Guido Fawkes, qui suit de très près les soubresauts de la course, Rishi Sunak avait vendredi soir 103 parrainages, devant Boris Johnson (68) et Penny Mordaunt (25). Ni M. Sunak ni M. Johnson n’ont pour l’heure confirmé leur candidature. Ensuite, les députés devront soit se mettre d’accord sur deux noms que les 170.000 adhérents du parti devront départager par un vote en ligne d’ici au 28 octobre, soit sur le nom d’une seule personne qui entrerait alors immédiatement à Downing Street. Si d’ici à lundi en début d’après-midi M. Johnson et Mme Mordaunt ne réussissaient pas à atteindre le seuil des 100 parrainages requis (sur 357 députés), Rishi Sunak deviendrait automatiquement chef du parti et Premier ministre.
Penny Mordaunt a été la première vendredi à officialiser sa candidature pour succéder à Liz Truss, lançant la course à Downing Street pour laquelle se renforce l’hypothèse, il y a peu inimaginable, d’un retour de Boris Johnson. « Je suis candidate pour être la cheffe du parti conservateur et votre Première ministre, pour unir notre pays, réaliser nos engagements et remporter les prochaines élections législatives », a écrit sur Twitter Penny Mordaunt, 49 ans, mettant en avant « l’intérêt national ». Ancienne ministre de la Défense charismatique, elle avait créé la surprise l’été dernier en arrivant en troisième position dans la campagne qui avait suivi la démission de Boris Johnson.
Come-back de Johnson ?
Dans cette semaine politique rocambolesque, ce dernier semble se positionner : trois mois après sa démission due à une succession de scandales, sa candidature prend corps –et suscite une opposition féroce chez certains– à mesure que les députés dévoilent qui ils soutiendront. Boris Johnson est en vacances dans les Caraïbes, mais selon un allié au Parlement, James Duddridge, « il va prendre l’avion pour revenir ». « Il a dit : ‘Nous allons le faire, je suis prêt' », selon ce député qui a échangé avec lui sur WhatsApp. Populaire et respecté auprès de la base du parti, le ministre de la Défense Ben Wallace a indiqué qu’il penchait pour son ancien patron. « Il reste encore plusieurs jours, nous verrons ce qui se passe », a-t-il tempéré.
Selon un sondage YouGov, 52% des Britanniques seraient mécontents de voir « Boris » revenir. Seuls 27% souhaitent ce retour, mais une majorité parmi les électeurs conservateurs de 2019, signe de sa popularité persistante dans l’électorat de la majorité malgré les scandales qui ont entraîné sa chute. Les proches de Boris Johnson mettent en avant la légitimité qu’il tire de son triomphe électoral fin 2019. Ses opposants rappellent la succession de mensonges et d’affaires embarrassantes des trois ans de son mandat, qui ont laissé des traces profondes. Certains députés conservateurs avertissent même qu’ils démissionneront si Johnson revient.
Vu par le camp Johnson comme un traître qui a précipité sa chute, Rishi Sunak était le candidat préféré des députés conservateurs l’été dernier, avant d’être finalement écarté au profit de Liz Truss par les adhérents.
Crise sociale
« Je suis pour Rishi », s’est exclamée face à l’AFP Elaine Stones, une agriculture de 58 ans vivant dans la circonscription de Rishi Sunak, Richmondshire dans le nord de l’Angleterre. « Il aurait dû l’avoir au premier coup. Il est honnête et fiable ». Le futur chef du gouvernement sera le cinquième depuis le référendum du Brexit en 2016 et le troisième en deux mois. Il ou elle prendra la tête d’un parti miné par les divisions face à une opposition travailliste au plus haut dans les sondages, mais surtout d’un pays plongé dans une grave crise du coût de la vie. L’inflation dépasse les 10%, au plus haut depuis 40 ans, dans un contexte social tendu au Royaume-Uni où les grèves se sont multipliées ces derniers mois, notamment dans les transports.
Confortée par des sondages qui lui donnent une avance inédite depuis un quart de siècle, l’opposition n’a de cesse de réclamer la tenue immédiate d’élections anticipées, sans attendre deux ans comme prévu. Mais la majorité, après 12 ans de pouvoir, s’y refuse et cherche un successeur en interne. Arrivée le 6 septembre à son poste, Liz Truss reste à la tête du gouvernement en attendant la nomination de son successeur. Troisième femme à avoir dirigé le gouvernement britannique, elle a battu des records d’impopularité et décroche le titre peu enviable de Première ministre la plus éphémère que le Royaume-Uni ait jamais connu.