Un tribunal russe a placé jeudi 30 mars le journaliste américain Evan Gershkovich en détention provisoire pour deux mois, après son arrestation et son inculpation pour espionnage. Il s’agit d’un cas sans précédent dans l’histoire récente du pays, dans un contexte de forte répression depuis le début de l’invasion de l’Ukraine. « Une mesure préventive a été choisie sous la forme d’une détention (…) jusqu’au 29 mai 2023 », a déclaré la cour dans un communiqué en précisant que sa détention pourra être prolongée. Le journaliste est soupçonné d’espionnage au profit des États-Unis et de collecter des informations sur une entreprise du complexe militaro-industriel russe, un crime passible de dix à vingt ans de prison selon l’article 276 du code pénal russe. La diplomatie russe a affirmé que le journaliste américain avait été pris sur le fait : « Ce que faisait le collaborateur de la publication américaine Wall Street Journal à Iekaterinbourg n’avait aucun rapport avec le journalisme », a commenté la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova. Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, s’est dit « extrêmement préoccupé ». La presse française s’est dite profondément préoccupée pour la sécurité du journaliste américain et a condamné l’attitude répressive de la Russie envers la presse.
Le Wall Street Journal a réfuté avec véhémence ces accusations d’espionnage et s’est dit profondément préoccupé pour la sécurité de son journaliste. Des représentants du gouvernement américain ont contacté la Russie pour obtenir un accès consulaire au journaliste détenu, tandis que la Maison Blanche a assuré être en contact avec sa famille. La Kremlin a mis en garde Washington contre toute forme de représailles visant les médias russes travaillant aux États-Unis. « Nous espérons qu’il n’y en aura pas, et il ne doit pas y en avoir », a précisé Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin. La Russie a récemment durci sa législation réprimant l’espionnage depuis qu’elle a envahi l’Ukraine. Plusieurs ressortissants américains sont encore détenus en Russie, dont Paul Whelan, un ancien marine américain arrêté en 2018 qui purge une peine de seize ans de prison pour « espionnage » dans une affaire que l’intéressé et Washington jugent montée de toutes pièces. Enfin, plusieurs médias ont été réprimés en Russie depuis l’offensive contre l’Ukraine et les règles d’accréditation pour les journalistes étrangers sont de plus en plus strictes.