Les personnes éligibles à l’assurance chômage sont 25 à 42% à ne pas engager de démarches d’ouverture de droits auprès de Pôle emploi. Ces « non-recourants » ont en moyenne cumulé moins de droits au chômage et affichent un retour à l’emploi plus rapide que les recourants.
Une part non négligeable des salariés ne perçoit pas les indemnités de chômage auxquelles elle a pourtant droit. C’est ce que révèle une étude du ministère du Travail transmise au Parlement et à laquelle Les Echos ont eu accès ce lundi. D’après ces travaux, ce taux de non-recours, défini comme le ratio des personnes éligibles qui n’ouvrent pas leurs droits par rapport à l’ensemble des personnes éligibles, atteint 25 à 42%.
« Selon le champ et les hypothèses retenus, l’estimation du taux de non-recours des personnes non inscrites à Pôle emploi dans l’année qui suit leur fin de contrat varie entre 25% et 42 %, ce qui représente sur un an entre 390.000 et 690.000 personnes non-recourantes », précisent les auteurs de l’étude.
Un taux de non-recours proche de celui du RSA
L’estimation centrale du rapport exclut notamment les personnes déjà couvertes par l’assurance chômage de l’analyse. Selon cette hypothèse centrale, « environ 30% des personnes âgées de 25 à 60 ans qui connaissent une fin de contrat dans le secteur privé sans être inscrit préalablement à Pôle Emploi et qui remplissent les critères d’éligibilité ne recourent pas à l’assurance chômage ».
Les auteurs notent que le non-recours à l’assurance chômage est ainsi « proche de celui qu’on peut observer pour les autres prestations », citant les taux de « 34% pour le RSA », « 32% pour les retraites ».
Quel profil pour les non-recourants?
Ces actifs « non-recourants » présentent des caractéristiques assez similaires à celles des personnes bénéficiaires, en termes de CSP, d’âge et de sexe. En revanche, les salariés en contrats courts – soit en CDD, soit en intérim– sont moins représentés parmi les recourants que les personnes en CDI.
Les demandeurs d’emploi qui ne demandent pas à être indemnisés ont, en moyenne, moins travaillé que les bénéficiaires et enregistrent donc des droits au chômage moins conséquents. Dernier point de différence mis en lumière par l’étude, le retour à l’emploi des non-recourants est en moyenne plus rapide. Ils sont un quart à revenir sur le marché du travail dans le mois suivant la fin de leur contrat précédent tandis que seulement 15% des demandeurs d’emploi bénéficiaires retrouvent un emploi aussi rapidement.
Une étude basée sur les critères d’éligibilité de 2017
Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs de la Direction des statistiques du ministère du Travail (Dares) ainsi que de l’Ecole d’économie de Paris se sont concentrés sur la période allant de novembre 2018 à octobre 2019. Les effets du Covid, et ceux de la réforme des règles d’indemnisation du chômage appliquée depuis octobre 2021, ne sont donc pas pris en compte dans ces travaux.
Les critères pris en compte pour qualifier les personnes éligibles sont donc ceux, définis par la convention Unedic de 2017, qui s’appliquaient avant cette réforme. Pour avoir droit à l’assurance chômage, un salarié devait alors avoir travaillé quatre mois sur les 28 mois précédents la rupture ou la fin de contrat. Cette condition devait être vérifiée sur les 36 mois précédents pour les demandeurs d’emploi de plus de 53 ans. L’actif devait aussi être inscrit à Pôle emploi et être à la recherche d’un travail pour bénéficier d’une allocation de chômage.
Les auteurs ont souligné que leur travail d’estimation s’est heurté à plusieurs difficultés, dont le fait que les données administratives « ne permettent pas d’observer la condition de recherche effective d’emploi » ou le fait qu' »environ un tiers des personnes ayant une fin de contrat » sont déjà couvertes par l’assurance chômage en raison de leurs contrats précédents.