Après les scientifiques, les bloqueurs de rue, les dégonfleurs de pneus de SUV ou les lanceurs de soupe dans les musées, le front des activistes mobilisés pour le climat s’est encore élargi. Des représentants de cinq religions – catholique, protestante, musulmane, juive, et bouddhiste – se sont ainsi donné rendez-vous, mardi 29 novembre, devant une station TotalEnergies, dans le 15e arrondissement de Paris.
La cible ? Les projets Tilenga et Eacop (Oléoduc de pétrole brut d’Afrique de l’Est), soit l’exploitation de ressources pétrolières dans la région du lac Albert en Ouganda et la construction d’un pipeline géant transfrontalier en Tanzanie, « le pipeline chauffé le plus long du monde », dénoncent les opposants, qui entraîneraient « l’expropriation de 100 000 personnes » et « rejetterait l’équivalent de 379 millions de tonnes de CO2 », soit 34 millions de tonnes par an. Dans le viseur aussi, le Crédit agricole, « premier soutien financier de Total ».
Devant la station, dont l’accès n’était pas bloqué et où les automobilistes, surpris, venaient faire leur plein, ces porte-parole ont expliqué les raisons de leur engagement dans une action de « désobéissance civile », soutenus par deux dizaines d’activistes. L’action était organisée par Greenfaith (« foi verte »), une ONG née aux Etats-Unis en 1992 et devenue internationale au moment de la COP21 de Paris, en 2015, et XR Spirit, la branche « spiritualités » d’Extinction Rébellion, dont la naissance, en France, a été officialisée en juillet 2022.
De grandes bannières reflètent cet engagement religieux : pour les catholiques, « délivrez-nous de Total », pour les juifs, « encore plus de pétrole nous mène au Shéol [“séjour des morts”] » ou encore, pour les musulmans, « pour une planète en équilibre, Yallah Yallah ! ».
Commandements de la Thora
Pour Anouar Kbibech, 61 ans, président du Rassemblement des musulmans de France depuis 2007, qui regroupe 300 mosquées, « le respect de la planète, de sa sauvegarde, fait partie intégrante de la foi musulmane ». Tout en citant de nombreux versets de différentes sourates, celui qui fut aussi président du Conseil français du culte musulman de 2015 à 2017, estime que « cette préoccupation n’est pas assez portée par la communauté musulmane ».
Le rabbin Yeshaya Dalsace, 65 ans, ne dit pas autre chose. Spécialiste de la question – il a rédigé sa thèse de rabbinat, en 2000, sur le rapport entre écologie et judaïsme –, il estime aussi que « ce n’est pas nécessairement la préoccupation première, ce n’est pas une obsession, il n’y a pas que ce problème ». Pour autant, rappelle-t-il, « la Thora nous dit bien que l’on n’est pas propriétaire de la terre » et que « détruire un arbre est interdit » : cela fait partie des 613 commandements de la Thora.
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