Hors de prix. C’est le commentaire le plus fréquent dès que l’on évoque la question de l’achat d’une voiture électrique. Le tarif moyen d’un modèle neuf, toutes motorisations confondues, dépasse déjà les 25 000 euros, mais la facture fait un nouveau bond dès lors qu’on passe au 100 % batterie. Il faut compter plus de 32 000 euros pour une Renault Zoe, et l’écart entre la version électrique et la version thermique d’une citadine telle que la Peugeot 208 atteint (avant les aides publiques) près de 15 000 euros. Depuis son lancement, en mars 2021, le tarif de la Dacia Spring, rare modèle à vocation populaire, a crû de 16 990 euros à 20 880 euros.
Il aura fallu l’arrivée de marques chinoises, comme MG, Great Wall Motors ou BYD, qui pratiquent des prix sensiblement inférieurs à leurs concurrents, pour que soit ouvertement posée la question de la capacité des grands constructeurs à proposer des modèles moins exclusifs, si ce n’est à la portée de M. Tout-le-Monde. La problématique n’est pas nouvelle, mais l’électrification du marché a accentué la dérive de la voiture chère.
Même si une automobile fonctionnant avec une batterie est plus onéreuse à produire, les grandes marques ont une part de responsabilité. Entre 2015 et 2022, note le consultant britannique JATO, le prix moyen d’une voiture électrique est passé de 48 942 à 55 821 euros en Europe, soit un écart de 27 % par rapport à un modèle conventionnel. En Chine, au contraire, le tarif a baissé de 66 819 à 31 829 euros, et un véhicule électrique est aujourd’hui 33 % moins cher en moyenne qu’un thermique.
Conformément aux impératifs dictés par les autorités chinoises, les marques locales ont conçu et produit des modèles – pas seulement de petite taille ou exclusivement urbains – capables d’atteindre des niveaux de diffusion élevés. A contrario, « malgré quelques améliorations depuis 2020, les constructeurs occidentaux ont privilégié les segments les plus rentables et ne sont pas parvenus à créer une offre de véhicules électriques qui corresponde aux besoins des consommateurs », conclut JATO.
La nécessité de rééquilibrer l’offre est devenue impérative – même BMW et Volvo témoignent de leur volonté d’investir dans « la gamme inférieure » –, car le temps presse. Le durcissement des normes environnementales, en particulier la généralisation progressive, à l’horizon 2025, des zones à faibles émissions (ZFE) dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants, accélère le mouvement d’exclusion des véhicules les plus anciens, utilisés le plus souvent par des ménages à revenus modestes. Sans propositions alternatives susceptibles de motoriser à moindre coût une large partie de la population, le passage au tout-électrique, programmé par l’Union européenne en 2035, risque de devenir un thème politiquement explosif.
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