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« Que manque-t-il pour bifurquer vers un modèle social écologique ? »

« Que manque-t-il pour bifurquer vers un modèle social écologique ? »


L’issue de la COP27 nous apporte une preuve de plus de notre enracinement dans le monde d’avant et de notre incapacité à nous projeter dans celui d’après. C’est l’occasion de nous interroger sur ce qui, historiquement, a rendu possibles des changements de trajectoire, et sur ce qui, aujourd’hui, empêche de basculer vers un modèle social-écologique respectueux des limites planétaires et de l’humanité.

Rétrospectivement, l’installation et les mutations du capitalisme paraissent avoir croisé trois conditions : premièrement, l’existence d’un projet de société, d’un « esprit » au sens de Max Weber (L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, 1905) ; deuxièmement, des leviers disponibles adaptés, dont les principaux sont la monnaie et l’énergie ; troisièmement, un contexte d’instabilité poussant les autorités publiques à agir.

Le capitalisme marchand, qui se développe à partir du XIIe siècle, est porté par un « projet de société marchande », un désir d’échanges, d’accumulation de marchandises. Le capitalisme industriel, qui prend son essor à la fin du XVIIIe siècle, est le fruit d’un projet productiviste, d’une volonté d’utiliser au mieux les ressources disponibles pour produire et consommer toujours plus. Le capitalisme financier, des années 1970 à nos jours, a quant à lui été porté par un projet politique de libéralisation, une foi dans la finance comme source de croissance.

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Pour ce qui est des leviers, la monnaie de crédit émise par les banques a été l’institution nécessaire à l’essor du capitalisme. Libérée du métal précieux de l’ordre monétaire féodal, elle a permis l’expansion du capital, car elle porte en elle l’injonction à croître : elle est une avance sur la production, une invitation à produire plus que ce qui a été emprunté, pour payer l’intérêt qui est le prix de cette monnaie marchande.

Verrous intellectuels

Le capitalisme marchand a fonctionné avec l’énergie des animaux et des hommes, amenant l’esclavage et le colonialisme pour en disposer davantage. La monnaie bancaire est restée le levier monétaire du capitalisme industriel, mais l’énergie fossile a remplacé l’énergie humaine. L’énergie fossile est demeurée le carburant du capitalisme financier, mais le levier monétaire a changé. Dans le capitalisme financier, il faut que les titres donnent accès à la monnaie : banques et banques centrales créent de la monnaie non plus seulement par le crédit, mais par l’achat de titres.

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Concernant le contexte, c’est généralement sous la pression des guerres, des épidémies, des famines, des crises économiques et financières, que des changements de régime ont pu s’opérer. La seconde guerre mondiale a ainsi fait émerger un « capitalisme contractuel » à la recherche d’un compromis entre capital et travail. La crise inflationniste des années 1970 l’a fragilisé et permis aux gouvernants d’exprimer leur volonté de libéralisation financière, faisant éclore le capitalisme financier.

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