Au même moment, à l’issue d’un entretien en Indonésie avec son homologue américain Joe Biden à la veille d’un sommet du G20 boudé par Vladimir Poutine, le président chinois Xi Jinping, crédité jusqu’à présent d’un soutien tacite à la Russie, s’est dit « très préoccupé » par le conflit en Ukraine. Pour Volodymyr Zelensky, la prise de Kherson marque « le début de la fin de la guerre ». La reprise des territoires occupés par la Russie est « un chemin long et difficile », « le prix » à payer étant « élevé », mais « il est impossible de tuer l’Ukraine ».
Dans son adresse quotidienne sur internet, le président ukrainien a ensuite affirmé lundi soir qu’avant de quitter la ville les forces russes avaient « détruit toutes les infrastructures cruciales » de Kherson. « Absolument toutes les installations importantes de la ville et de la région sont minées ». Le Kremlin a de son côté continué d’affirmer que Kherson, officiellement annexée en septembre au même titre que la région du même nom, appartenait à la Russie bien que ses troupes aient dû l’abandonner.
Les informations à retenir :
- Au G20, la « plupart des membres » « condamnent fermement » le conflit et veulent adopter le terme de « guerre »
- De retour de Kherson, le président ukrainien a plaidé en visioconférence devant l’assemblée de dirigeants
- Les forces russes sont toujours présentes à l’est de l’Ukraine avec plusieurs vagues de frappes
Le projet de communiqué du G20 reconnaît les effets de la « guerre en Ukraine »
Les grandes économies du G20, dont Moscou, constatent les répercussions négatives de la « guerre en Ukraine » menée par la Russie dans un projet de communiqué final consulté mardi par l’AFP, qui précise que « la plupart des membres » « condamnent fermement » le conflit.
Ce document, s’il est adopté par les dirigeants, reprendrait le terme de « guerre » rejeté pour l’instant par Moscou qui évoque une « opération militaire spéciale ». Il juge « inadmissible » le recours ou la menace de recours à l’arme nucléaire et appelle à prolonger l’accord sur les exportations de céréales.
Zelensky plaide devant le G20
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a plaidé mardi devant le G20 pour une extension « infinie » de l’accord permettant d’exporter des céréales ukrainiennes, qui arrive à échéance vendredi.
« Notre initiative pour les exportations de céréales mérite d’être prolongée indéfiniment, peu importe quand la guerre se finit », a-t-il déclaré par visioconférence à huis clos devant le sommet de Bali, selon la traduction en anglais consultée par l’AFP. Il a également proposé que l’accord négocié en juillet sous l’égide de la Turquie, qui a permis de livrer quelque 10 millions de tonnes de céréales, soit étendu à deux autres ports ukrainiens.
De retour de Kherson, ville du sud de l’Ukraine tout juste reprise par son armée, Volodymyr Zelensky a été l’un des premiers à s’exprimer par visioconférence devant ce qu’il appelé le « G19 », excluant la Russie. Dans la salle était pourtant présent le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, par lequel Vladimir Poutine s’est fait représenter.
« Je suis convaincu qu’il est temps à présent que la guerre destructrice de la Russie s’arrête », a déclaré le président ukrainien, dans son désormais familier t-shirt kaki. Elle « doit et peut être arrêtée », selon la traduction en anglais consultée par l’AFP. Il a détaillé son plan pour ramener la paix et « sauver des milliers de vies »: ne pas faire confiance à la Russie, ne tolérer « aucune excuse au chantage nucléaire » face aux « folles menaces » de Moscou et réaliser un échange total de prisonniers.
Face à des dirigeants de pays du Sud touchés de plein fouet par les conséquences économiques du conflit, il a proposé de prolonger « indéfiniment » l’accord permettant des céréales ukrainiennes, exportateur agricole majeur. L’accord négocié en juillet sous l’égide de la Turquie, qui a permis de livrer quelque 10 millions de tonnes de céréales, arrive à échéance vendredi et Moscou laisse planer le doute sur ses intentions, faisant craindre des famines à l’ONU.
Au G20, le président Joe Biden s’est dit confiant pour la suite du conflit
Le président américain Joe Biden a, lui, salué une « victoire importante », et même si selon lui l’évolution du conflit va « ralentir à cause de l’hiver », il s’est dit « confiant dans le fait que la Russie ne va pas occuper » l’Ukraine, à l’issue de sa rencontre avec Xi Jinping en Indonésie.
Les deux hommes se sont accordés sur leur « opposition » à tout recours à l’arme nucléaire en Ukraine, selon la Maison Blanche. « La Chine a toujours été du côté de la paix et continuera à encourager les pourparlers de paix », a déclaré le dirigeant chinois. Le patron de la CIA américaine William Burns rencontrait lundi de son côté son homologue russe Sergueï Narychkine à Ankara en Turquie, où il l’a mis en garde contre toute attaque nucléaire.
« Ne pas sous-estimer » les forces russes
Les forces russes ont été contraintes de se retirer la semaine dernière de Kherson après huit mois d’occupation, laissant le champ libre aux soldats ukrainiens pour entrer vendredi dans la ville. Interrogé sur ce déplacement du président ukrainien à Kherson, le Kremlin a de son côté continué d’affirmer que la ville appartenait à la Russie.
« Nous ne commenterons pas, vous savez bien que c’est le territoire de la Fédération de Russie », a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov. Kherson avait été la première grande ville et la seule capitale régionale à tomber après l’invasion russe déclenchée fin février. Le retrait forcé des troupes de Moscou face à la pression de la contre-offensive ukrainienne a constitué un camouflet pour le président Poutine.
« Les mois à venir seront difficiles » pour l’Ukraine, a toutefois averti le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg. « Nous ne devons pas commettre l’erreur de sous-estimer la Russie » a-t-il déclaré à La Haye, estimant que « l’objectif de Poutine est de laisser l’Ukraine froide et sombre cet hiver ».
L’armée russe a mené ces dernières semaines plusieurs vagues de frappes massives de missiles et drones kamikazes sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes. Elle a affirmé lundi avoir conquis une localité de l’Est de l’Ukraine, Pavlivka, un rare succès revendiqué par Moscou après des semaines de revers et de retraites.
Lundi, le service de renseignement ukrainien a annoncé avoir arrêté à Kherson un militaire russe « déguisé en civil », alors que les craintes sont fortes que des soldats de Moscou soient toujours présents dans la ville. Interrogés par l’AFP, des habitants de Kherson ont raconté les mois d’occupation russe et pour certains, leurs actes de résistance pour aider la contre-offensive ukrainienne.