C’était l’un des nombreux scandales financiers dans lesquels Credit Suisse est empêtré. Il vient de se résoudre par une sanction financière de 238 millions d’euros, qui ira directement alimenter les caisses de l’Etat d’ici un an, et évitera à la deuxième banque helvétique de passer par la case procès en France, pour « démarchage illégal de clients sur le territoire français » et « blanchiment de fraude fiscale aggravé », entre 2005 et 2012.
Lundi 24 octobre, le tribunal judiciaire de Paris a homologué une Convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) conclue trois jours plus tôt, le 21 octobre, entre le Parquet national financier (PNF) et la banque. La CJIP est cet outil inspiré du modèle américain de justice négociée, introduite en France par la loi de 2016 dite « Sapin 2 » – du nom de l’ex-ministre de l’économie et des finances socialiste, Michel Sapin. Il permet au procureur de la République de proposer à une personne morale, mise en cause pour des faits strictement définis (corruption, atteintes à la probité, trafic d’influence, fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale, délits environnementaux), une transaction l’exonérant de poursuites pénales. Et ce, sans que l’entreprise concernée ne soit contrainte de reconnaître sa culpabilité.
Visé par une enquête du PNF depuis avril 2016, Credit Suisse était soupçonné d’avoir aidé de riches clients français à dissimuler de l’argent au fisc, sur le fondement de signalements effectués par deux autorités judiciaires étrangères. Pour solder ses ennuis judiciaires, le groupe a donc accepté de régler 238 millions d’euros pour solde de tout compte, soit 123 millions au titre d’une amende d’intérêt public et 115 millions supplémentaires au titre des dommages et intérêts. Des montants calculés selon la règle fixée par la loi, adossée au montant des profits illicites réalisés.
Redorer une image fragilisée
Les faits étaient accablants. Selon la convention dévoilée lundi, l’enquête du PNF avait permis d’identifier « 4 999 clients français (…) disposant d’un compte au Credit Suisse, depuis parfois plus d’une dizaine d’années, représentant des avoirs dissimulés (…) de deux milliards d’euros ». Des commerciaux appartenant à un bureau spécialement créé démarchaient ces clients « en toute discrétion », lors de visites confidentielles dans des hôtels ou des restaurants chics, leur proposant des numéros de comptes assortis ou non de codes, sans qu’aucun relevé de compte ou autre document ne sorte jamais de Suisse. Des structures offshore, créées par l’entremise d’intermédiaires (sociétés fiduciaires, avocats spécialisés, etc.) pour opacifier davantage les montages, pouvaient faire partie du package. Ces clients ont tous été redressés par le fisc depuis.
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