Un petit tour et puis s’en va. Dix jours après avoir annoncé la présentation d’une loi rapide sur l’immigration, Gérald Darmanin doit rétropédaler sur le calendrier. « Notre main ne tremble pas », avait-il lancé, le 25 juillet, sur RTL, évoquant la présentation dès la rentrée de septembre d’une loi pour lever « toutes les réserves » législatives empêchant l’expulsion du territoire des étrangers délinquants. Mais, jeudi 4 août, le ministre de l’intérieur a finalement indiqué dans Le Figaro que l’examen du texte était reporté. Il sera remplacé par un « grand débat » organisé sur le sujet au Parlement, en octobre, précédé, « dès la fin août et en septembre », d’une « concertation Place Beauvau avec tous les partis, les partenaires sociaux, les associations et les représentants de la société civile ». Ce n’est qu’après, vraisemblablement fin 2022 ou début 2023, qu’un projet de loi sera présenté. L’intéressé précise qu’il agit ainsi « à la demande » de la première ministre, Elisabeth Borne.
Recadrage d’un ministre trop pressé ? C’est ce que veulent croire certains au sein de la majorité. « Il est parti trop tôt, trop vite ! », observe un pilier du parti présidentiel, selon lequel Darmanin n’a « pas compris » que la nouvelle composition de l’Assemblée « risquait de lui faire perdre sur tous les fronts », alors qu’il se retrouvera coincé entre une droite et une extrême droite susceptibles de juger le texte « pas assez ferme », une gauche « vent debout » et une majorité « fracturée ». Ce député Renaissance rappelle que c’est sur les sujets régaliens que la Macronie se montre le plus divisée. Or, ce qui était « gérable » pendant le premier mandat, avec une majorité absolue, le serait – selon cette même source – beaucoup moins avec une majorité relative. « Pour Darmanin, c’est un revers », relève un conseiller du gouvernement, alors que le ministre de l’intérieur se voit contraint de revenir sur ce qu’il a lui-même annoncé.
Pour Elisabeth Borne, confrontée aux ambitions des poids lourds de son gouvernement, à qui la succession de Macron dans cinq ans donne déjà des ailes, ce report est un moyen de poser son autorité. L’association SOS-Racisme s’est d’ailleurs empressée de lire cette annonce comme « un recadrage » bienvenu de la part de la première ministre. « Elisabeth Borne a imprimé sa marque sur l’agenda parlementaire, se réjouit lui aussi le président de la commission des lois, Sacha Houlié (Renaissance), issu de l’aile gauche de la majorité. Elle s’est alignée sur les trois priorités des Français : pouvoir d’achat, environnement et sécurité. Ce dernier sujet est plus important que l’immigration. »
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