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Le coup d’envoi au gigantesque chantier de la carte Vitale biométrique est donné

Les frais de fabrication d'une carte Vitale biométrique pourraient s'élever à 15 euros contre 4,40 euros auparavant pour une carte classique.


La carte Vitale va faire peau neuve : elle va devenir biométrique. Une première enveloppe de 20 millions d’euros en faveur de cet énorme chantier a été votée au Sénat dans la nuit de mardi à mercredi pour lancer le mouvement, avec l’accord du gouvernement. Le président du groupe Les Républicains au Palais du Luxembourg, Bruno Retailleau, avait fait de cette mesure une condition pour voter le projet de loi de Finances rectificative.

Marotte de la droite et de l’extrême droite depuis une dizaine d’années, au programme de Marine Le Pen lors des trois dernières élections présidentielles, la mise en place de la carte Vitale biométrique serait pour ses partisans un moyen essentiel de lutter contre la fraude sociale.

Un lien infalsifiable entre la carte et son détenteur

A l’instar des passeports français depuis 2008 ou, plus récemment, des cartes d’identité , le passage au biométrique permet de fait d’établir un lien infalsifiable entre la carte et son détenteur grâce à une puce intégrant les données des utilisateurs comme ses empreintes digitales.

Après avoir rejeté une proposition de loi sénatoriale similaire il y a deux ans, invoquant « la protection de la vie privée et des données personnelles », le gouvernement n’y est désormais plus opposé.

Le ministre de la Santé, François Braun, a jugé que cette proposition « mérite d’être travaillée » et avait annoncé en juillet une « mission parlementaire » sur le sujet, assurant que le gouvernement doit « s’assurer que les prestations sont versées à bon droit, que les cotisations et contributions sociales sont recouvrées de manière exhaustive ».

Estimations difficiles

Difficile pour autant de chiffrer la fraude sociale . Chacun y va de son estimation. Mercredi matin, sur RTL, Bruno Retailleau a assuré qu’il y avait « plus de 7 millions de cartes Vitale en circulation de plus qu’il n’y a de Français ». Affirmant qu’« un Français, c’est une dépense de santé autour de 3.000 euros », les économies pourraient alors, selon lui, s’élever à « plus de 20 milliards d’euros ».

Ce chiffre de 7 millions est démenti par les autorités. Le 19 juillet, lors des questions au gouvernement, le député LR Thibault Bazin avait quant à lui évalué à « 1,8 à 2 millions » le nombre de cartes Vitale surnuméraires en France, reprenant une estimation de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale de 2020 s’appuyant sur un rapport de la Cour des comptes. La Caisse nationale d’Assurance maladie juge ces dernières données surévaluées, et minimise l’impact des cartes surnuméraires, beaucoup de doublons n’étant pas liés à des fraudes (carte perdue puis retrouvée par exemple).

Coût important

Dans un rapport de la commission des Affaires sociales de 2019 , la sénatrice LR Catherine Deroche prévenait par ailleurs que l’attribution d’une carte Vitale biométrique à l’ensemble des bénéficiaires des prestations d’assurance maladie « représenterait un coût important ».

Sur la base d’un renouvellement moyen de 3,6 millions de cartes Vitale par an, la Caisse nationale d’Assurance maladie a jugé que l’actualisation intégrale des cartes pourrait prendre vingt ans.

Les frais de fabrication d’une carte Vitale biométrique pourraient s’élever à 15 euros contre 4,40 euros pour une carte Vitale classique, soit un coût total de 900 millions d’euros. L’équipement des professionnels de santé reviendrait à 60 millions d’euros.

Vives contestations

Du côté des professionnels de santé, les premières réserves se sont fait entendre : « Le Sénat gaspille 20 millions pour une mesure inutile et passéiste qui peut faire perdre du temps médical », a commenté sur Twitter Philippe Besset, président de la Fédération des pharmaciens d’officine.

« Cela revient toujours à penser que ce sont les pauvres qui font le trou dans les dépenses alors que les grosses dépenses ne sont pas là », a pointé Agnès Giannotti, présidente de MG France, premier syndicat de médecins généralistes.

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