Didier Mineur est professeur de philosophie politique à Sciences Po Rennes, auteur d’Archéologie de la représentation politique. Structure et fondement d’une crise (Presses de Sciences Po, 2010) et de Le Pouvoir de la majorité. Fondements et limites (Classiques Garnier, 2017).
Si l’on parle de « majorité » parlementaire, on utilise en revanche moins la notion de « minorité » parlementaire que celle d’« opposition ». Qu’est-ce qui distingue la minorité de l’opposition ? Quelles relations les trois notions entretiennent-elles ?
L’opposition est une minorité permanente : de ce point de vue, elle fait signe vers un régime de partis politiques. Certes, il n’est pas impossible d’imaginer une « opposition » dans un régime de démocratie directe, ou dans un régime représentatif sans partis politiques structurés. Il n’en reste pas moins que cette minorité permanente qu’est l’opposition est fortement consolidée par l’existence d’un régime de partis organisés : celui-ci suppose en effet des programmes, et donc le regroupement a priori de questions différentes. L’élection de représentants pour le temps d’une mandature « fixe » donc la majorité et la minorité pour l’ensemble des enjeux abordés par les programmes électoraux.
L’existence d’une opposition peut-elle être considérée comme bénéfique pour la démocratie ?
On considère souvent que le couple majorité et opposition est nécessaire à la bonne santé démocratique d’un régime parlementaire. En effet, cela rend l’alternance possible et donne aux électeurs le choix entre deux (au moins) grandes orientations politiques. Il faut cependant nuancer cette idée.
D’abord parce que, contrairement à la majorité, l’opposition n’est pas nécessairement unie. Certes, la majorité peut être constituée par une coalition hétéroclite (c’est le cas dans plusieurs démocraties voisines), mais elle est au moins unie par un accord de gouvernement. Ce que l’on appelle « l’opposition » peut quelquefois regrouper des oppositions très diverses.
Or, c’est là la seconde nuance, rien ne garantit que l’opposition soit « loyale », c’est-à-dire qu’elle ne remette pas en cause le système de gouvernement. Ainsi certains partis politiques, qui peuvent devenir la principale force d’opposition, sont-ils révolutionnaires (cas des partis communistes dans le passé), antiparlementaires (cas des partis fascistes avant-guerre), séparatistes (comme, à ses débuts, la Ligue du Nord en Italie, le Vlaams Belang en Belgique…).
Qu’est-ce qui distingue l’opposition parlementaire des autres types d’opposition politique ?
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