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Tarascon hantée par son « usine qui pue »

Tarascon hantée par son « usine qui pue »


Katia Bertaud, cheffe de cabinet et directrice de la communication de la mairie de Tarascon, l’assure : « Cela fait vingt-cinq ans que j’habite ici. Je n’ai jamais entendu quiconque se plaindre de l’usine. » Certains de ses concitoyens diront qu’il vaut mieux entendre cela que d’être sourd ou de souffrir d’anosmie, la perte de l’odorat. Car, dans un rayon de plusieurs kilomètres autour de cette petite ville du nord des Bouches-du-Rhône, nul n’ignore l’odeur dégagée par la papeterie Fibre Excellence. Selon les appréciations, celle-ci oscille entre l’œuf pourri, le soufre, le pet, le chou-fleur et oblige, certains jours, à fermer les fenêtres, le temps qu’elle se dissipe. Y compris à Arles, 20 kilomètres plus au sud, quand le mistral transporte les effluves. Là-bas comme ailleurs, on maudit alors ce site connu dans toute la région sous la même appellation : « l’usine qui pue ».

Même ceux qui ne l’ont jamais vue connaissent son existence, du fait de l’odeur si caractéristique. Impossible, toutefois, de ne pas l’apercevoir quand on passe dans les environs, avec sa haute cheminée rayée rouge et blanc, en surplomb de la voie de chemin de fer Avignon-Marseille. Comme le dit Lucien Limousin, le maire (divers droite) de cette ville de 16 000 habitants, « elle fait partie de notre patrimoine ». L’odeur, la pollution de l’air et du Rhône, les bruits ? M. Limousin ne trouve rien à redire. L’usine n’aurait-elle donc aucun défaut ?, lui demande-t-on après sa plaidoirie en faveur du plus gros employeur privé (250 salariés) de cette commune, où le chômage s’établit à 14,3 %, selon le recensement Insee de 2019. « Vous, les journalistes, vous n’écrivez que des articles à charge ! », répond le maire. Autrefois, quand les habitants interpellaient sa prédécesseure, Thérèse Aillaud, maire de 1983 à 2002, celle-ci répondait : « Mon usine ne pue pas ; elle sent l’oseille ! » Aujourd’hui, Fibre Excellence rapporte 7 millions d’euros par an à la communauté d’agglomération.

C’est en 1951 que s’installe au bord du Rhône celle qu’on appelle alors « la Cellulose ». Le bois arrive par tonnes pour produire de la pâte à papier. L’odeur devient vite caractéristique, les populations s’y habituant tant bien que mal génération après génération. « Pour beaucoup de personnes, elle a longtemps fonctionné comme une sorte de madeleine de Proust », relève Alexandre Régnier, membre du conseil d’administration de France Nature Environnement 13 et secrétaire de l’association écologiste Les Flamants roses du Trébon, en lutte depuis six ans contre ce site classé Seveso.

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