Trop cher, la place de cinéma ? Les salles obscures ont connu un septembre noir avec 7,32 millions d’entrées, selon le Centre national du cinéma et de l’image animé. C’est le plus bas niveau pour ce mois depuis 1980, hormis 2020, année de la pandémie. En pleine crise du pouvoir d’achat, l’Etat s’inquiète. L’attaque contre le prix du ticket est venue de figures du monde culturel tricolore.
L’acteur Kad Merad, d’abord : « ce n’est pas donné. Quand on part en famille, qu’on prend deux glaces, trois bonbons, ça fait des soirées chères », a-t-il estimé sur RMC. Puis l’auteure Anne Goscinny d’appuyer sur RTL : « aujourd’hui, une place de cinéma, c’est beaucoup trop cher. Pour 15 euros par mois, vous avez accès à des plateformes [de streaming, NDLR] ». Des prises de position sur lesquelles s’est alignée la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak. Le 21 septembre, lors du congrès des exploitants de salles, son ton était cash : » il n’y a pas que [Kad Merad] qui le dit. Tous les jeunes rencontrés dans le cadre du Pass Culture me parlent de cette barrière du prix. L’un m’a dit : ‘entre acheter trois paquets de pâtes et aller au cinéma, je choisis les pâtes.
«
Un billet jugé beaucoup trop cher
En réalité, les 15-18 ans bénéficiaires du Pass (380 euros offerts pour des activités culturelles) peuvent l’utiliser pour le cinéma. L’Etat a déjà financé 2,5 millions de places via ce dispositif. Mais difficile d’attirer de nouveau les jeunes dans les salles obscures une fois le crédit utilisé. La barrière prix ne ferme pas seulement les portes aux plus jeunes. D’après une étude du CNC, publiée en mai, « la perception du prix du billet « est l’une des raisons de la moindre fréquentation pour 36 % des sondés ». Et atteint même 46% chez les 35-49 ans.
Inaudible pour les exploitants qui ripostent, chiffres en main. Par le jeu des réductions (chômeurs, seniors, comités d’entreprise, cartes illimitées…) le ticket moyen est à 7,04 euros. Six places sur dix sont vendues à moins de 7 euros et 16% seulement plus de 10 euros. Alors, « pour payer le prix fort, il faut bien viser ! », dit, un peu irritée, Marie-Christine Désandré, vice-présidente de la Fédération Nationale des Cinémas de France.
Un public déçu de l’offre
Le distributeur de films Christophe Courtois, lui, déplace le sujet : « le problème n’est pas tant le prix mais plutôt le fait que le public se dit, dans certains cas, ‘je n’en ai pas pour mon argent’. Il faut faire des films plus spectaculaires. » Ardavan Safaee, président de Pathé Films, confirme dans l’hebdomadaire Ecran Total : « les parts de marché de nos salles premium sont très performantes, alors que les places y sont plus onéreuses. Quand l’offre est attrayante, suscite du désir auprès du public, le prix n’est pas un problème (…) la priorité est de travailler davantage l’offre « . Le 6 octobre, une partie du cinéma s’est mobilisée pour appeler le gouvernement à organiser des Etats généraux. S’ils ont lieu, ces questions du prix et de l’offre ne pourront être esquivées.